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La Ménagerie de verre, “trip in memory”

La Ménagerie de verre – Spectacle vu le 14 avril 2016
A l’affiche du Théâtre de la Colline jusqu’au 28 avril 2016
De Tennessee Williams – Mise en scène Daniel Jeanneteau
Avec : Solène Arbel, Pierric Plathier, Dominique Reymond, Olivier Werner

Comment déposer les bribes d’une mémoire sur un plateau de théâtre ? Daniel Jeanneteau y parvient à merveille, nous offrant un spectacle d’une absolue beauté.

Daniel Jeanneteau est arrivé à La Ménagerie de verre par le biais d’une commande lancée par le Centre culturel de Shizuoka, près de Tokyo. Lui qui pensait a priori ne pas aimer la pièce découvre une écriture singulière, basée sur un effet de distance avec le réel. “The play is memory” : c’est ainsi que Tennessee Williams présente lui-même son œuvre. Dans la mémoire, tout peut être exagéré ou éludé. Le monde est forcément affecté par la charge affective et émotionnelle liée aux souvenirs.

Tenter de restituer ce qu’est un espace intérieur : c’est précisément ce challenge que Daniel Jeanneteau a souhaité relever, cette difficulté à laquelle il a aimé se frotter. Le résultat, qui peut sembler déroutant si l’on n’accepte pas ce principe de départ, permet de pénétrer dans les différentes couches de souvenirs de Tom. En fonction des bribes qu’il nous raconte et de leur acuité respective, la densité des personnages évolue. Daniel Jeanneteau offre ainsi aux quatre comédiens l’occasion de déployer une vaste palette de jeu. Toujours inouïe sur un plateau, Dominique Reymond est Amanda Wingfield, cette femme obsédée par sa jeunesse perdue, qui vit seule avec ses deux enfants adultes et va orchestrer l’éclatement de sa funeste cellule familiale.

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Personnage central, Amanda passe par tous les stades : tantôt spectrale et glaciale, tantôt extrêmement réaliste et concrète. D’un instant à l’autre, au gré de la mémoire de Tom, elle se montre violente, douce, tyrannique, intraitable, drôle, brutale, ingénue, perverse, amère, farouche, légère, frivole, charmeuse, intransigeante, impitoyable et captivante. Les trois autres comédiens ne sont pas en reste. Solène Arbel, touchante de fragilité et d’étrangeté, Pierric Plathier, son “galant” déniché par Tom pour faire plaisir à sa mère et l’excellent Olivier Werner en narrateur aux airs de Cassandre nous font voyager de souvenirs en remembrances, d’évocations en impressions. Un voyage d’une beauté rare et entière.

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En attendant une tournée et une reprise, il est encore temps d’aller découvrir cette Ménagerie si poétique et troublante :

1 – Tout est sublime sur le plateau : les effets de son et de lumière, la scénographie simple et belle – un plateau carré entouré de rideaux blancs translucides, qui apportent cette “déréalisation” souhaitée par l’auteur.
2 – Autour d’une Dominique Reymond miraculeuse, les trois autres comédiens répandent leurs propres miracles.
3 – Au bout du compte, Daniel Jeanneteau relève ce challenge de nous embarquer dans une quasi-réminiscence de Tennessee Williams.

 

 

 

 

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