Songe à la douceur : shoot de bonheur

Dès son titre, le spectacle musical Songe à la douceur, adapté du roman jeunesse de Clémentine Beauvais et mis en scène par Justine Heynemann, nous fait la promesse d’un voyage vers un pays où rêver d’absolu et d’horizons enchantés. Ici, ce pays prend les contours de l’adolescence et c’est au rythme de chansons survitaminées, interprétées au clavier, à la batterie et à la guitare électrique, que l’histoire de Tatiana, Eugène, Olga et Lenski se dessine.

En narratrice – slash – commentatrice – slash – Madame Loyal – slash – main du destin, Rachel Arditi, toute en charme et facétie, mène la danse de ce ballet musical où, comme dans le poème de Baudelaire, il est question d’« aimer et de mourir », mais aussi de jeunesse, de commencement, de fuite, d’amitié, de perte et d’idéal. Traversé de références à la littérature, Songe à la douceur est avant tout une réinterprétation libre du roman Eugène Onéguine, de Pouchkine : à 14 ans, Tatiana tombe amoureuse du ténébreux et flegmatique Eugène, 17 ans. Dans un décor de grandes fleurs bleues et de carrés de pelouse surélevés, les temporalités se mélangent. A l’adolescence, Eugène rejette Tatiana. Dix ans plus tard, leurs chemins se recroisent et les dés de leur histoire amoureuse sont relancés.

Frais, vif, Songe à la douceur est un petit shoot de bonheur et de fantaisie, qu’infusent de belles lumières ouatées et des pluies de paillettes bleutées. La question de l’amour croise celle de l’absolu, sans jamais se départir d’un regard tendre et malicieux sur les personnages et l’histoire racontée, comme lors du récit de l’éveil sensuel de Tatiana : le torse d’Eugène entraperçu inopinément lors d’un pull relevé un peu trop vite et c’est toute la narration qui s’emballe, dans un jeu de ralenti et de commentaires troublés de Tatiana, sur la promesse contenue dans cette vision. Drôlerie et sensibilité s’entremêlent ainsi tout au long du spectacle, sans éluder pour autant les moments plus graves ; le récit des tourments ou des tragédies qui peuvent traverser des vies liées les unes aux autres. Les comédiens, qui se font tour à tour musiciens et chanteurs, nous embarquent du début à la fin du spectacle. Une parenthèse de douceur, donc, dans un pays qui nous ressemble.

Constance Trautsolt

SONGE À LA DOUCEUR
Au Théâtre Paris-Villette du 13 au 30 décembre 2022
D’après le roman de Clémentine Beauvais Songe à la douceur (éditions Sarbacane) / musique Manuel Peskine / livret Rachel Arditi, Clémentine Beauvais, Justine Heynemann / mise en scène Justine Heynemann / assistante à la mise en scène Stéphanie Froeliger / avec Manika Auxire ou Lucie Brunet, Rachel Arditi, Elisa Erka ou Charlotte Avias, Valérian Béhar-Bonnet, Manuel Peskine, Benjamin Siksou / scénographie Marie Hervé / costumes Madeleine Lhopitallier / lumières Aleth Depeyre / chorégraphie Alexandra Trovato / © Cindy Doutres
Recommandé à partir de 9 ans

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