Articles

La tragédie de Hamlet, mise en scène par Dan Jemmett

Merci pour cette reprise de la tragédie de Hamlet à la Comédie-Française

Spectacle vu à la Comédie-Française – Salle Richelieu, le 14 juin 2015
A l’affiche jusqu’au 26 juillet 2015
Mise en scène Dan Jemmett

 © Cosimo Mirco Magliocca

Y a t-il quelque chose de pourri au royaume de la critique ?…

Un autre spectacle que j’avais découvert lors de sa création l’année dernière et que je suis retournée voir en famille. Eh oui! Pour ceux d’entre vous qui n’auraient pas encore saisi… je suis FAN de la Comédie-Française. Descendue par la critique, la mise en scène du britannique Dan Jemmett m’avait emballée. L’idée de départ d’avoir transposé l’intrigue dans un “club-house” seventies ne m’avait pas choquée, au contraire.
Je me souviens des nombreux papiers qui s’insurgeaient contre rouflaquettes et pattes d’éph’. Et alors? Qu’importe! En quoi ces décors et costumes décalés vont-ils à l’encontre du chef-d’oeuvre intemporel de Shakespeare?

Ce qu’apporte à mon sens le facétieux Dan Jemmett pourrait se résumer à trois mots : limpidité, humour et performance collective.
Limpidité de la traduction d’Yves Bonnefoy, qui rend tellement accessible le texte de ce cher William. Limpidité de la mise en scène, qui parvient à replacer le récit dans la quotidienneté et la modernité.
Humour : car il est vrai que l’on rit souvent au cours des trois heures que dure le spectacle. L’on y rit énormément, s’agissant de l’une des plus sombres tragédies du répertoire.
L’esprit de Shakespeare est sans doute dans ce rire-là, n’en déplaise aux “mauvais coucheurs”, ces “ronchons de la critique”! Citons pour seul exemple le subterfuge qui permet à Elliot Jenicot d’incarner les deux personnages de Rozencrantz et Guildenstern en même temps. Bravo pour ce numéro de ventriloque!
Performance collective enfin, et pas uniquement parce que nous sommes face aux “meilleurs des meilleurs”. Aussi parce que Dan Jemmett parvient à insuffler sa folie pince sans rire à l’ensemble de ces comédiens d’exception. Hervé Pierre, en ignoble et trivial Claudius, tellement convaincant, est sans doute le plus hilarant de tous.

Et puis, il y a Denis Podalydès, toujours aussi magistral. Il campe un Hamlet tellement juvénile, pâle, fragile, angoissé. Ainsi qu’un Hamlet désespéré, enragé, imposant, révolté. Le comédien boulimique de théâtre embrasse enfin “le rôle des rôles”. Et “le succès des succès” est bien au rendez-vous.

Ce Hamlet ne sera pas repris la saison prochaine, alors courez-y d’ici fin juillet :

1 – La mise en scène de Dan Jemmett qui continue de déchaîner la critique est saluée unanimement par le public, notamment les jeunes et très jeunes!
2 – Le rendez-vous tant attendu Denis Podalydès / Hamlet vaut sérieusement le détour : un rôle unique pour une immense palette de talents.
3 – Les autres comédiens sont comme toujours impeccables, cette petite touche de folie “jemmettienne” en plus.

Hervé Pierre_Portrait Comédie-Française

Hervé Pierre, 522éme Sociétaire de la Comédie-Française

Entré à la Comédie-Française en 2007 et devenu Sociétaire en 2011, Hervé Pierre nous raconte comment il a choisi le théâtre pour religion, avant même son 10ème anniversaire…

Qui n’a pas eu la chance d’assister à “l’épopée Peer Gynt” au Grand-Palais en 2012 a loupé un grand moment de théâtre.
La mise en scène était signée Eric Ruf et le héros était incarné par un Hervé Pierre inoubliable.
Pendant près de 5 heures, cet immense comédien faisait défiler toute une vie, de l’adolescence à la mort de Peer Gynt.

Lorsqu’on rencontre Hervé Pierre, on a l’impression de retrouver cet adolescent qui nous avait à ce point touchés.
Originaire du Doubs, il est “tombé dans la marmite” vers 8 ou 9 ans, grâce à la troupe de théâtre amateurs de ses parents.
Il se souvient avec une émotion communicative de ce jour précis où il est monté sur une scène et a choisi le théâtre comme religion.

Voilà près de 50 ans que cette religion guide ses pas. Une religion qui l’a mené des bancs de l’Ecole du TNS au statut de Sociétaire de la Comédie-Française.
Cette année, on a pu le (re)-découvrir sur la scène du Français dans Les Estivants de Maxime Gorki. Il vient de terminer les représentations de Dancefloor Memories au Studio Théâtre et s’apprête à reprendre le rôle de Claudius dans la formidable mise en scène du Hamlet de Dan Jemmet.
Puis il enchaînera sur les répétitions de George Dandin pour la reprise et la tournée de la saison prochaine. Dans le rôle du metteur en scène cette fois-ci.
Le rythme fou de l’alternance ne lui a pas fait renier sa religion, bien au contraire! Monter sur scène tous les soirs de la semaine, enchaîner parfois deux et même trois représentations dans la même journée, repousser certaines limites : il semble être né pour cela!
Et si notre religion à nous, spectateurs passionnés de spectacle vivant, c’était d’aller à la rencontre de comédiens comme Hervé Pierre? Des comédiens à ce point touchés par la grâce…

 

INTERVIEW