Ce “fou” de théâtre parvient à communiquer sensations et émotions, à la manière des poètes d’autrefois…
La première chose qui frappe chez Jean-Damien Barbin, c’est sa voix. Une voix chaude, grave, rocailleuse, envoûtante. Pour un peu on fermerait les yeux et on l’écouterait parler pendant des heures. Ce jour-là, justement, le comédien ne voit que d’un oeil. Des suites d’une opération subie la veille. Il espère recouvrer la vue avant la première du Roi Lear d’Olivier Py qui inaugurera dans la Cour d’Honneur le prochain Festival d’Avignon. Un Roi Lear dans lequel il incarnera le fou. Un fou qui guide son Roi et tente de l’éloigner d’une sorte d’aveuglement spirituel. Un aveuglement engendré par le pouvoir et la vanité. Un aveuglement spirituel auquel répond l’aveuglement physique de Gloucester. Car l’aveuglement est bien l’un des thèmes principaux de la pièce de Shakespeare… Etrange collision, non, que celle de son actualité théâtrale avec l’existence de Jean-Damien Barbin?
Cependant, lorsque je le rencontre, le 21 mai 2015, ce n’est pas son oeil morne qui soucie le comédien. C’est la prise de Palmyre, berceau de la civilisation, berceau de la poésie (“Palmyre, c’est Jérusalem!“, s’exclame-t-il). C’est peu de dire qu’il semble bouleversé, lui qui était en Syrie en 2012 pour y tourner un film sur les événements. Ce qui arrive aujourd’hui à Damas, il l’avait prédit. A la manière du fou de Lear qui prédit le chaos…
Que reste-t-il alors?… Le théâtre bien sûr, et la poésie. Par amour de la langue il a fait de la scène son lieu d’habitation, son refuge. Il a débuté sa formation au Conservatoire National de région de Nantes, sa ville natale, puis à l’école de la rue Blanche à Paris, l’ENSATT et, enfin, au Conservatoire National dans les classes de Denise Bonnal, Michel Bouquet et Daniel Mesguich. Lequel Daniel Mesguich l’avait nommé professeur au CNSAD, rôle qu’il a tenu passionnément, jusqu’à l’éviction de son ami.
L’une de ses envies, lui qui reconnaît avoir été gâté par ses rencontres? Etre dirigé par le jeune homme ou la jeune femme qu’il aura formé durant toutes ces années. Car il regarde l’avenir en se retournant, à la manière d’Orphée. Poète et philosophe, il “aspire à être libre comme l’oiseau qui suit sa route sans laisser de trace”. Il en laisse forcément une, de trace, dans la mémoire du spectateur qui le croise sur une scène!
Les douze coups de Jean-Damien Barbin
Piano Panier : Un coup de coeur?
Jean-Damien Barbin : La Syrie
Piano Panier : Un coup de gueule?
Jean-Damien Barbin : La Syrie!
Piano Panier : Coup de blues?
Jean-Damien Barbin : Michel Jonasz
Piano Panier : Coup bas?
Jean-Damien Barbin : L’ONU
Piano Panier : Coup de foudre?
Jean-Damien Barbin : Une main…
Piano Panier : Coup de génie?
Jean-Damien Barbin : La poème
Piano Panier : Coup de sang?
Jean-Damien Barbin : Cou de sang (cf. Apollinaire)
Piano Panier : Coup de tête?
Jean-Damien Barbin : La Corse
Piano Panier : Coup d’essai?
Jean-Damien Barbin : La joie
Piano Panier : Coup dur?
Jean-Damien Barbin : Maman
Piano Panier : Coup d’envoi?
Jean-Damien Barbin : Silence!
Piano Panier : Coup de théâtre?
Jean-Damien Barbin : Jésus…