La Mouette de Thomas Ostermeier : saisissante réflexion contemporaine

La Mouette – spectacle vu le 31 mai 2016
A l’affiche de l’Odéon Théâtre de l’Europe jusqu’au 25 juin 2016
Une pièce d’Anton Tchekhov
Mise en scène : Thomas Ostermeier
Avec : Bénédicte Cerutti, Valérie Dréville, Cédric Eeckhout, Jean-Pierre Gos, François Loriquet, Sébastien Pouderoux de la Comédie-Française, Mélodie Richard, Matthieu Sampeur et l’artiste peintre Marine Dillard

La Mouette Ostermeier Matthieu Stampeur
© Arno Declair

 

« Nous connaissons la scène, il y a des hommes rassemblés et quelqu’un qui leur fait un récit »  – Jean-Luc Nancy, La communauté désœuvrée.

C’est le principe même du théâtre, évidemment. On pourrait dire de La Mouette que nous connaissons la pièce, et que les classiques sont attendus au tournant. Surtout quand ils parlent de théâtre et d’amour. Et surtout quand ils commencent avec une réflexion sur la Syrie, face public, au micro, dans un décor relativement minimaliste.

Sauf que… Thomas Ostermeier offre une version contemporaine pertinente de la pièce. Il adapte la traduction d’Olivier Cadiot, mêlant un langage quotidien avec un langage plus élaboré et poétique. Le metteur en scène tacle le théâtre contemporain avec humour et vivacité ; il interroge les nouvelles formes possibles du théâtre et de la création. La mise en scène de Nina et Treplev n’est pas sans rappeler un certain paysage de créations actuelles, à la Angelica Liddell et Romeo Castellucci, très juste, surtout dans un rapport de confrontation de deux générations de théâtre – celle d’Arkadina et celle de Nina.

 

La Mouette Ostermeier

 

Pas de vidéo pour autant, mais une artiste peignant à la brosse sur le mur du fond pendant le déroulement de la pièce. Métaphore du théâtre, comme un art qui s’élabore et évolue en direct. On croit d’abord voir se dessiner l’envol d’une mouette, puis un paysage montagneux en bordure de lac. Puis, finalement, l’artiste recouvre le tout de noir, créant un grand rectangle, un peu à la façon du « noir-lumière » de Soulages. « Noir-lumière », à l’image de ce ciel bleu chargé de nuages électriques que peint Tchekhov au bord du lac où évolue la dramaturgie. Les allusions au temps ne sont jamais anodines. Elles ne sont que le reflet de l’intériorité tourmentée et passionnée des personnages.

 

La Mouette Ostermeier

Les scènes attendues sont revisitées avec une très belle intelligence et il faut souligner le jeu des acteurs, absolument formidable. Un petit bijou qui pose avec justesse la question de la place de l’artiste dans son époque. À voir évidemment. À voir absolument.

0 réponses

Répondre

Se joindre à la discussion ?
Vous êtes libre de contribuer !

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *