Le Garçon incassable : spectacle inclassable
Buster, en anglais signifie chute. Dès son plus jeune âge, Joseph Keaton fut rebaptisé Buster, à la suite d’une mémorable culbute dans les escaliers. Tomber, se fracasser, choir, trébucher, s’écrabouiller…l’existence de Buster Keaton fut une succession inouïe de chutes plus spectaculaires les unes que les autres. Il en fit son métier, son gagne-pain, sa passion, sa vie. Le genre de vie que n’aurait pu expérimenter Henri, l’autre personnage du spectacle. Handicapé de naissance, Henri est l’antithèse de Buster, le “non casse-cou” par obligation, le garçon qu’il faut surveiller comme le lait sur le feu.
@Christophe Raynaud de Lage
“Le père d’Henri, il dit qu’il faut les casser, les enfants. Pas seulement les plier, les casser.”
Ces deux vies d’exception, ces deux univers, Florence Seyvos les a racontés dans un roman qui lui valut le prix Renaudot poche 2014. Deux récits parallèles dont le metteur en scène Laurent Vacher s’est emparé avec brio. Présentée pour la première fois au festival off d’Avignon, cette création repose sur deux comédiens et un magicien.
On navigue entre deux époques, deux espaces-temps, deux parcours de vie… et toutes les émotions de Buster et Henri.
Le spectacle mêle des scènes de la vie réelle de Buster Keaton avec des extraits de ses films, dont certains nous font hurler de rire, encore aujourd’hui. Grâce à l’ingéniosité du procédé scénique, on s’attendrait presque à voir sortir de l’écran la star hollywodienne, façon “La Rose pourpre du Caire”.
“Toute sa vie, Buster fera des chutes, il deviendra une sorte de spécialiste de chute.”
En plus de celui de la narratrice, Odja Llorca endosse plusieurs rôles : mère de Buster, première épouse de Buster, seconde épouse de Buster, soeur protectrice d’Henri, elle est toujours juste, émouvante, magnétique. Ses deux partenaires, le comédien Martin Selze et le magicien-fakir Benoît Dattez endossent tous les autres rôles et nous font naviguer d’un univers à l’autre : chorégraphies jazzy, duos de ukulélé, tours de magie, fakirisme… tous nos sens sont en alerte dans ce spectacle inclassable. Inclassable car tellement touffu, nourri de diverses disciplines. Inclassable car plutôt novateur dans la forme et la narration.
Alors on se laisse prendre au jeu, ce jeu de ping-pong entre Buster le casse-cou et Henri le frère bancal.
Jusqu’à cette dernière scène, où l’on retient son souffle, où l’on se dit que finalement, certains ont le pouvoir de fabriquer de la féérie et du mystère. Alors pourquoi pas, un jour, un garçon, un enfant incassable ?…
LE GARCON INCASSABLE
Compagnie du Bredin
À l’affiche de la Caserne des Pompiers du 7 au 23 juillet 2017 – 18h15
Un texte de : Florence Seyvos
Adaptation et mise en scène : Laurent Vacher
Avec : Benoit Dattez, Odja Llorca, Martin Selze
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