Une corde qui grince et la mort passe

Au terme d’un concert classique, un fan un peu envahissant (Christophe Malavoy) rend visite dans sa loge à un chef d’orchestre de renom (Tom Novembre).

Au fil de ses irruptions dans l’intimité physique et mentale du chef d’orchestre, une sensation de malaise et d’absurde s’installe. Irruptions et promiscuité qui pourraient être la métaphore d’autres irruptions et promiscuité en des temps plus graves, que la mémoire et le discours de l’admirateur révèlera pour notre plus grand effroi.

Fausse Note au Théâtre Michel, avec Christophe Malavoy et Tom Novembre

L’admirateur a des exigences hors normes auxquelles le chef d’orchestre cède d’abord conciliant, ensuite contraint.

On a, dans un premier temps, une impression d’absurde et de bouffonnerie énervante jusqu’à ce que l’admirateur accule le chef d’orchestre et l’oblige à un terrible aveu. On se demande quand même pourquoi il avoue à ce moment-là, alors qu’il a su taire cette partie de sa vie pendant la majorité de son existence.

S’ensuivra alors un jeu de marionnettiste : l’admirateur, un pervers narcissique, résoudra le chef d’orchestre à la pantomime.

On assiste à l’effondrement psychologique d’un homme qui doit, d’abord, pour sauver sa réputation, ensuite pour sauver sa peau, jouer le jeu que son agresseur l’oblige à jouer. Mais qui est véritablement l’agresseur ? C’est ce que la pièce nous dévoile peu à peu, abordant des thèmes aussi importants et implacables que la responsabilité, le libre-arbitre et la fatalité. « J’obéissais aux ordres » la trop célèbre réplique d’Eichmann sur laquelle le chef d’orchestre tentera de justifier son acte.

Fausse Note au Théâtre Michel, avec Christophe Malavoy et Tom Novembre

Didier Caron, qui nous emmène habituellement sur le terrain de la comédie, a creusé ici une écriture dramatique qui nous convainc.

Les acteurs nous emportent  avec maîtrise dans ce duel cruel, même si l’on pourrait reprocher à Tom Novembre une première partie de jeu un peu trop sur le même registre, l’énervement. Quoi qu’il en soit, l’ensemble nous a semblé assez magistral, fin, juste, plein de répliques claquantes, de plaisanteries aigres-douces et de références à l’histoire. D’ailleurs, ce fameux chef d’orchestre fait suite au célèbre Karajan…

La mise en scène, très épurée, se fond sur de subtiles variations lumineuses et de déplacements à roulettes dans une lenteur inquiétante qui appuie l’effroi que porte le texte.

La salle, pleine et recueillie tout le long de la pièce, applaudit à tout rompre, manifestement satisfaite de sa soirée au théâtre Michel.

Une bonne pièce, un bon texte, de bons comédiens, sans fausse note.

 FAUSSE NOTE
À l’affiche du Théâtre Michel du 21 septembre 2017 au 14 janvier 2018 (jeudi au samedi 21h, samedi 16h30 et dimanche 16h)
Une pièce de Didier Caron
Mise en scène : Didier Caron et Christophe Luthringer
Avec : Christophe Malavoy et Tom Novembre

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