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Le syndrome de Cassandre par le clown magi-chien

Le Syndrome de Cassandre – Spectacle vu le 17 mars 2016
A l’affiche du Théâtre de Rond-Point jusqu’au 10 avril 2016
Un spectacle de et avec Yann Frisch
Coécriture Raphaël Navarro

Quand un clown prisonnier d’une cage invisible nous appelle au secours…

Il nous accueille une banane à la bouche. Mais lui ne l’a pas, la banane. Il est plutôt maussade, bougon, sombre et mélancolique.
On a l’impression de le déranger. Le sentiment d’être au zoo, stoppés net devant la cage d’une créature évoquant un homme à tête de chien. Une cage d’exception pour un être d’exception. Qui est-il ? Mi-clown mi-magicien, il est surtout extrêmement seul, bien qu’habitué aux visites comme la nôtre. Alors il se moque de nous, contrefait nos rires. Et plus il raille, plus on rigole.

Il semble n’avoir jamais connu d’autre univers que ce cube transparent, cette prison de verre qui abrite objets de compagnie et fantasmes les plus fous. Aux côtés d’un pantin désarticulé qu’il nous présente comme sa mère se côtoient une chaise invisible, une scie musicale, un tiroir façon jukebox, un cochon en plastique patriote, une échelle d’accès à un nuage, et tout un tas d’accessoires dignes des plus grands illusionnistes.

 

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©Sylvain Frappat

Philosophe résigné, poète désabusé, artiste incompris, le « magi-chien » se plie de plus ou moins bonne grâce à nos desiderata. Quitte à friser le ridicule, à sombrer davantage dans la dépression. A plusieurs reprises, il tente de nous faire passer notre chemin. Alternant la conjuration, les injonctions, osant jusqu’aux injures. On a beau se sentir un peu cruel, on ne peut cependant s’empêcher de demeurer. D’épier chacun de ses gestes, à l’affût de nouveaux tours et de bons mots. N’est-on pas venu pour rire à ses dépens, pour rire envers et contre tout, pour rire du meilleur et du pire ? Car le pire est toujours à venir… C’est ce que notre clown tente de nous faire entendre, à l’image de la Cassandre des tragédies grecques. Il n’y parviendra qu’à l’ultime fin du spectacle – et quelle fin !

Sacré champion du monde de magie close-up en 2012, Yann Frisch se dévoile ici davantage clown que magicien :

1 – Yann Frisch est circassien, magicien, clown, poète, comédien, et surtout bourré de talents.
2 – Lorsqu’il prend à partie le public, c’est toujours de façon subtile et percutante : notre Cassandre, c’est lui !
3 – Rarement fin de spectacle nous aura autant sidérés : le clou du spectacle.

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Maligne : on a tous envie d’être la « Pénélope » de Noémie Caillault

Si Noémie Caillault n’a pas eu le choix de vivre avec le cancer, elle a eu celui d’en parler… Comme elle a bien fait!

Elle est virevoltante, spontanée, rieuse, enjouée, sautillante, tourbillonnante, « zébulonnante »!… Pleine de vie, quoi! C’est cela qui nous marque le plus lorsqu’on découvre Noémie Caillault sur la scène du Petit Saint-Martin. Débordante de vie. Après trois ans de combat contre cette maladie qui continue de faire peur. Cette maladie dont on se demande trop souvent – façon Stromae : « qui sera sa prochaine victime »? Aujourd’hui, nul ne peut affirmer qu’il n’est pas touché par le cancer. De près ou de loin, il résonne en nous. Comme dit Noémie, « il est devenu universel ».

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© Christopher Vootz

Face à l’universalité de ce mal du siècle, chacun réagit différemment. Noémie a choisi la scène comme ring de combat. Façon « stand-up », elle retrace les trois années qui viennent de s’écouler. Trois années de chimio, de peurs, de doutes, de bénéfices et d’effets secondaires, de phrases à la con… Elle raconte son parcours de combattante, ses échecs et ses victoires sur la maladie. Elle nous présente les nombreux protagonistes qui l’accompagnent dans cette bataille : les médecins pas toujours psychologues, les amis pas toujours bienveillants, les parents aux réactions souvent déconcertantes, les amoureux plus ou moins courageux…

Entendre parler de cette saleté de maladie pendant une heure trente : l’idée peut faire peur, j’en conviens. Mais Noémie l’aborde de telle sorte que l’on ne se sent à aucun moment dans la position du « spectateur-voyeur ». On est ému mais jamais mal à l’aise, on rit souvent, et surtout on s’attache à cette formidable comédienne qui est en train de naître sous nos yeux. Car le plus incroyable dans ce spectacle, c’est peut-être « la Noémie interprète ». Tellement jeune dans le métier qu’elle compte encore les jours de scène à son actif, à la manière des nouvelles mamans donnant l’âge de leur bébé. On a du mal à la croire, tellement elle est juste dans son jeu. Elle a appris très vite : sans doute l’un des « bénéfices secondaires » de sa maladie!

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Parmi toutes les nombreuses raisons d’aller découvrir Maligne, en voici au moins trois :

1 – La mise en scène ultra rythmée nous fait traverser trois ans de vie d’une malade, plusieurs dizaines d’hôpitaux, tout cela avec une chaise, deux tabourets et trois fauteuils…
2 – On a tous un frère, une mère, un oncle, un collègue, un ami, un enfant qui se bat contre le cancer. Noémie Caillault nous aide sans doute à mieux les comprendre.
3 – Personnellement, je suis sortie du Petit-Saint Martin avec le sentiment que moi aussi, j’avais un petit côté « Pénélope » – mais pour comprendre, il faut décidément aller voir le spectacle!

Maligne – Spectacle vu le 15 octobre 2015
Au Théâtre du Petit Saint-Martin jusqu’au 31 décembre 2015, les jeudi, vendredi et samedi  à 19h
Mise en scène Morgan Perez

INTERVIEW

Journal de ma nouvelle oreille de et avec Isabelle Fruchart

Voyage au centre de ses oreilles

Spectacle vu à Avignon en juillet 2013
A l’affiche du Studio-Hébertot, tous les soir à 21h à partir du 17 septembre 2015, puis en tournée
Spectacle écrit et interprété par Isabelle Fruchart dans une mise en scène de Zabou Breitman

 

© BM Palazon

Embarquez avec Isabelle Fruchart dans une promenade hors du commun : un voyage au creux d’une oreille pas comme les autres…

Deux ans déjà!… Deux ans que j’ai découvert ce spectacle « Journal de ma nouvelle oreille » (JDMNO pour les intimes) sur la scène du Chêne Noir d’Avignon. C’était la création. Et en même temps une sorte d’aboutissement.
Le spectacle, qui a pas mal tourné depuis, sera à l’affiche du Théâtre du Rond-Point du 3 juin au 4 juillet prochain. Puis en clôture du Festival « Seules en scène » au TOP – il sera d’ailleurs, hélas, l’ultime spectacle de ce lieu mythique…

Alors, c’est quoi au juste, ce JDMNO? Tout simplement un journal de bord, un journal intime. Celui que la comédienne Isabelle Fruchart a tenu pendant 9 mois. 9 mois particuliers de son existence : les 9 mois qu’ont duré son appareillage. Car Isabelle Fruchart a perdu l’audition à l’âge de 14 ans. Comme ça, sans explication. 25 ans plus tard, elle se fait appareiller et réinvite ses oreilles à la vie.

C’est donc un récit autobiographique que l’on découvre lorsqu’on assiste à ce spectacle. Isabelle Fruchart « joue » Isabelle Fruchart. Isabelle est dirigée par Zabou Breitman, qui avait assisté à une lecture de son « fameux journal » et l’avait immédiatement contactée pour lui proposer d’en faire un spectacle.

La mise en scène est plutôt épurée, s’agissant d’un monologue. Le partenaire principal d’Isabelle Fruchart, c’est la bande son.  Créée sur mesure par Laury Chanty, elle permet au spectateur de pénétrer à l’intérieur des oreilles d’Isabelle. Et de vivre à travers elles (les oreilles!) des sensations plus ou moins agréables… Croyez-moi : cette expérience vaut le déplacement, ce spectacle unique vous touchera sans doute de l’intérieur. Et vous n’écouterez peut-être plus jamais pareil…

Trois raisons de réserver vos places au Théâtre du Rond-Point :

1 – Le thème abordé dans ce spectacle n’est pas tant celui du handicap que celui de la beauté du monde qui nous entoure :  une ode à la vie, tout simplement.
2 – Zabou Breitman, avec la sensibilité qui la caractérise, a su donner vie à ce journal peu commun.
3 – Isabelle Fruchart qui incarne son propre rôle est une comédienne tout en empathie, elle a les oreilles grandes ouvertes sur le monde et c’est un bonheur de la voir écouter aussi farouchement!!

 

INTERVIEW

 

ELECTRONIC KIT PRESS

EMMA MORT MEME PAS PEUR

Emma mort, même pas peur

Emma, la Clown philosophe

Spectacle vu au Théâtre 71 de Malakoff le 16 avril 2015
Actuellement en tournée (dates sur le site emmalaclown.com)
Spectacle écrit et interprété par Meriem Menant dans une mise en scène de Kristin Hestad

 
Emma mort même pas peur affiche © Pascal Gély

« Alors moi je demande une question : comment on sait qu’on est mort. Et qu’on n’est pas en train de dormir par exemple. » (signé : Emma)

Vous connaissez Emma la Clown ? Peut-être pas encore, et pourtant cela fait près de vingt ans qu’elle traîne son nez rouge sur les scènes de théâtre nationales. Originaire de Bretagne, elle écrit et interprète des spectacles sur des thèmes qui pourraient sembler austères, voire abscons. Elle a l’art de les rendre à la fois accessibles et drôles, de nous faire réfléchir et rire. De nous faire nous évader et nous questionner en même temps. Emma est une clown magicienne.

J’avais assisté l’an passé à sa Conférence sur l’Amour, un spectacle où elle tente de répondre, avec Catherine Dolto, à cette question plutôt vaste : « Au fond, c’est quoi l’Amour ? »… J’y étais allée avec ma fille, pré-ado et déjà amoureuse : succès garanti. Emma s’adresse à tous les publics. Emma est une clown universelle.

La semaine dernière, j’ai découvert un autre de ses spectacles dont j’avais beaucoup entendu parler. Emma, seule en scène cette fois-ci, s’attaque au sujet le plus grave, le plus dur, le plus effrayant… Emma nous parle de la Mort. De notre propre mort. A travers la sienne, qu’elle met en scène. Quel gageure de faire se gondoler une salle comble, constituée pour partie de jeunes relativement dissipés, à partir d’un thème aussi « plombant ». Emma est une clown ultra sensible.

On sort de la salle et on réalise que têtes de mort, cercueil, faux, testament, ossements, nous ont fait rire aux larmes. Et finalement on se dit : elle a raison Emma, il faut vivre plutôt que d’avoir peur de mourir… Et surtout il faut rire. Emma est avant tout une clown philosophe.

Pour découvrir ou redécouvrir Emma la clown, commencez par ce spectacle Emma mort, tellement fort sur l’unique chose que nous avons tous en commun finalement…

1 – Emma a choisi de s’associer à la metteur en scène Kristin Hestad, aussi intelligente qu’elle. Ensemble, elles ont fabriqué  un petit bijou.
2 – Ce spectacle est de ceux que l’on a envie de revoir, et de faire découvrir à ses proches, aux personnes que l’on aime.
3 – A tout le monde en fait : tout le monde devrait avoir la chance d’être rassuré par Emma sur sa propre mort

INTERVIEW

 

ELECTRONIC KIT PRESS

Grégori Baquet : la force d’un obus

Un obus dans le coeur

Vu au Théâtre des Déchargeurs le 17 avril 2014
Reprise aux Déchargeurs du 12 janvier au 20 avril 2015 et tous les soirs du mois de juin à 19h30
Festival OFF d’Avignon 2015 (4-26 juillet) au Théâtre du Balcon à 12h30
Mise en scène : Catherine Cohen

 

Copyright : iFou pour le Pôlemedia

« Quand Catherine Cohen dirige Grégori Baquet dans le formidable seul en scène de Wajdi Mouawad, on en prend forcément plein le coeur… »

Je suis une fan inconditionnelle du théâtre de Wajdi Mouawad. Surtout de ses premières pièces. Celles qui racontent la guerre, sa guerre : la guerre du Liban. Sa trilogie « Littoral – Incendies – Forêts » constitue une épopée qui a été jouée sur bon nombre de scènes nationales. J’ai découvert cet auteur par la lecture d’Incendies, à l’époque où je cherchais des textes pour ma troupe de théâtre amateur. Quel choc!

Ce thème de la guerre qui était traité dans Incendies, on le retrouve dans ce seul en scène. Les mêmes images d’horreur, les mêmes scènes de cauchemar. Et puis ce thème cher à l’auteur : la mort de la mère. Son absence, son silence, son évanouissement progressif, sa disparition brutale.

Catherine Cohen a choisi Grégori Baquet pour incarner « les démons de Mouawad ». Comme elle a bien fait!
Seul face à nous, pendant une heure et quart, il nous fait vivre cette guerre. Il nous la fait voir, sentir, toucher du doigt. Il nous la balance à la figure et au coeur. Aussi violent qu’une arme de combat.
Il nous balade d’une chambre d’hôpital à un désert libanais, d’un lit de mort à un bus piégé. Il nous fait sourire, rire même, pleurer aussi, mais avant tout réfléchir.

Grégori Baquet est imposant. Un immense comédien, si proche de nous sur cette petite scène des Déchargeurs. Si vous avez l’occasion de passer sur Paris, courez-y ! Sinon, séance de rattrapage en juillet 2015 à Avignon :  12h30 au Théâtre du Balcon…

Trois raisons d’aller découvrir « Un obus dans le coeur » au Théâtre des Déchargeurs ou cet été à Avignon 

1 – Pour le texte de Wajdi Mouawad, l’un des auteurs les plus doués du moment.
2 – Pour le formidable Grégori Baquet : bien plus qu’une révélation, il confirme ici l’étendue de son talent.
3 – Pour la mise en scène ultra sensible de Catherine Cohen ; juste un conseil : n’oubliez pas vos kleenex!…

INTERVIEW

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