HAMLET d’Ostermeier : ce fou furieux
Folie : trouble du comportement et/ou de l’esprit, considérée comme l’effet d’une maladie altérant les facultés mentales du sujet. Elle peut être furieuse : trouble mental accompagné de manifestations de violence. C’est le choix de Thomas Ostermeier. Hamlet est fou, il n’y a pas à tergiverser.
Lars Eidinger incarne avec génie un héros complètement dérangé, bedonnant, repoussant, qui vit encore chez ses parents. Un raté survolté. L’anti-héros par excellence. En alternant jeu et improvisation, il nous offre une folie démentielle, répondant à toutes ses impulsions, sans complexe. L’acteur va en chercher les limites jusqu’à les dépasser parfois. Mais la folie peut tout excuser. D’autant qu’elle n’est finalement pas si éloignée de nous.
La scène est recouverte de terre. On assiste aux funérailles du roi du Danemark. Les visages sont graves. On descend le cercueil, derniers adieux. Jusqu’ici, la scène est classique. Sauf que : un acteur sort un tuyau d’arrosage pour faire venir la pluie, et on sort les parapluies. Le fossoyeur bataille pour enterrer le cercueil – le roi n’arrive pas à être enterré – c’est tragique et burlesque à la fois. Puis on enchaine directement avec le banquet de noces. Sans transition. Mort et désir mêlés d’emblée.
@ Arno Declair
La pièce, adaptée avec justesse par le dramaturge Marius von Mayenburg, laisse place à toute la radicalité de la mise en scène d’Ostermeier, entre illusion théâtrale – du ketchup pour faire du sang – et juste modernité – utilisation de la caméra tout en finesse.
Presque 10 ans déjà que la pièce était si attendue dans la Cour du Palais des Papes. Elle ne l’était pas moins cette année au Théâtre des Gémeaux. Jusqu’au 29 janvier, on fonce à Sceaux, parce qu’on ne manque pas une mise en scène dans laquelle six comédiens se répartissent tous les rôles d’Hamlet. Parce qu’on ne manque pas un Hamlet génialement dingue, et surtout parce qu’on ne manque pas une mise en scène de Thomas Ostermeier.
HAMLET
Á l’affiche du Théâtre des Gémeaux de Sceaux – du 19 au 29 janvier 2017 (20h45, dimanche 17h)
Une pièce de William Shakespeare
Mise en scène : Thomas Ostermeier
Avec : Lars Eidinger, Jenny König, Robert Beyer, Damir Avdic, Franz Hartwig