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Les Conséquences, une ambitieuse fresque familiale de Pascal Rambert

Sur le plateau du Théâtre de la Ville, un immense barnum presque nu, deux rangées de tables de location qui attendent une réunion familiale, des extincteurs, quatre sorties de secours. Un espace presque vierge, comme une page blanche sur laquelle se détachera la calligraphie nette des corps et des vies. Comme une cage de laboratoire éclairée crument dans laquelle s’agiteront des humains, sous nos regards carnivores dévoreurs d’émotions et de pensées.

Jacques Weber ouvre seul le bal, le fermera seul aussi. Vieillard en tête-à-tête avec l’urne de son encore plus vieille défunte mère. Les 106 ans de l’ancêtre ont traversé l’Europe et le siècle comme une flèche. Elle avait quitté les forêts de Silésie, en avait gardé de robustes mains paysannes, s’est arrimée aux rues parisiennes, elle y a donné naissance à son fils unique, Jacques, et modelé son destin, « comme certains ont passé leur vie a traqué les nazis, elle a passé sa vie a traqué l’antisémitisme dans le langage ». Une lignée de lettrés, de notables, d’intellos jaillira de son exil. Ils sont tous là, presque tous, Jacques, sa femme, ses filles adultes et leurs conjoints, et leurs propres enfants, et leurs désirs d’enfants – ou non.
Il manque la fille aînée de Jacques, la « sœur folle ». Mais hormis elle, dont l’absence est si violente qu’elle compte pour une présence, ils sont tous là. Pour la cérémonie des funérailles de l’ancêtre. Puis trois ans plus tard, pour un mariage, puis trois ans plus tard pour d’autres funérailles, puis un autre mariage…

Pascal Rambert jette ses personnages dans une ronde sans fin, dans le cycle éternel des familles, naissances, morts, mariages, couples qui se nouent et se défont, corps qui s’abîment ou se réparent, flux et reflux des pulsions, diastoles et systoles du cœur, contractions et relâchements des liens.
Il leur donne les prénoms des interprètes. Jacques, Marilu, Anne, Audrey, Lena, Jisca, Mathilde, Paul, Arthur, Stanislas, Laurent. Ça n’a pas forcément d’importance, car c’est une fiction. Ou ça en a, car Stan dit « Audrey » à Audrey Bonnet quand il interpelle son épouse, car Laurent dit « Marilù » à Marilù Marini quand il se confie à elle, et cela ouvre une petite faille, ces prénoms partagés entre les rôles et les interprètes, par laquelle peut s’écouler une intimité plus particulière.

Sur le blanc du décor tranchent en une chorégraphie très graphique le noir des costumes des hommes, et les taches colorées des robes des femmes, unies, fluides, vives.
Il les fait courir, ces hommes et ces femmes, jaillir sur le plateau, se télescoper, franchir en coup de vent les issues de secours – si issue, si secours il y a –, et les ruptures de rythme, les immobilités en prennent d’autant plus de poids, de sens, comme du silence dans la cacophonie.

Pour ses interprètes, il compose une partition chatoyante, multiple, où il offre aussi, plus ouvertement qu’auparavant, le plaisir immédiat de franches situations de comédies.

La distribution est impériale, Jacques Weber et Marilu Marini en tête, impitoyables, facétieux, tendres. On se laisse particulièrement surprendre par Arthur Nauzyciel, irrésistible aussi bien dans un débordement d’énergie et de fantaisie que broyé de chagrin, par le tout jeune Paul Fougère, vif-argent, par Anne Brochet, délicate, sensible, mais tous relèvent avec le même engagement le défi d’habiter de leurs voix et de leurs gestes cet incroyable espace, d’habiter aussi la langue précieuse et triviale de Rambert, cette langue si dense, si profuse, si écrite et pourtant si vivante. Tous assument l’humour et portent haut l’émotion. On jubile de retrouver le couple formé par Audrey Bonnet, flamme ardente, et Stanislas Nordey, qui depuis Clôture de l’amour il y a déjà 15 ans n’en finit pas de se déchirer, et c’est beau de les voir ainsi prolonger leur histoire.

Le blanc barnum n’est pas le lieu des célébrations, qu’on entend en arrière-plan, mais c’est celui de la parole, et la parole aussi est un acte, créateur ou destructeur.
Alors, dans ces Conséquences on parle beaucoup, et on parle beaucoup de paroles, celles qui sont de trop et celles qu’on aimerait saisir : « on entend tout » autant que « qu’est-ce que tu disais ? ». Celles qu’on aurait dû taire et celles qui auraient dû être dites. On parle pour soi, pour l’absente, pour les cendres dans l’urne ou pour les spectateurs, on parle avec et contre les autres, on parle du passé et du futur. On parle du langage, sujet et matière de prédilection de Rambert, grand fouilleur et jongleur de mots, de son pouvoir, de ses faillites.

À travers ce vase clos, ces onze êtres, c’est notre époque qu’esquisse Rambert, notre société occidentale, vue depuis une certaine bourgeoisie éduquée, plutôt ancrée à gauche.
Et le portrait n’est pas si souriant, le patriarche a engendré une sororie de femmes blessées, et les idéaux politiques ont du plomb dans l’aile. Puisque le rouge finit toujours par pâlir et qu’avec l’âge on incline à droite, Jisca, jeune femme moderne, désabusée et pugnace, préfère gagner du temps, et opérer tout de suite le virage. La famille et la société semblent malades, les boomers sont désenchantés, les vieux on les oublie, la jeune génération présente la facture aux précédentes. Pourtant, si le tableau a ses ombres lourdes, point de nihilisme dans ces Conséquences. La vérité sort peut-être de la bouche des enfants, du moins Rambert accorde-t-il aux deux plus jeunes, à Lena et Mathilde, de rompre le pacte d’hypocrisie, d’être les seules qui répondent sincèrement à la petite et fondamentale question « tu pensais à quoi ? ». À elles, Jisca, Lena, Mathilde, à elles le futur, elles qui avancent sans illusion mais avec la volonté d’agir, chacune à leur façon, Jisca engagée dans la grande machine politique, Lena et Mathilde par l’action associative, toutes trois la part résiliente de la famille, peut-être même la part résiliente de la société, tête haute et verbe franc.

C’est un spectacle mosaïque, qui mêle les générations et les humeurs, laisse filer les époques par longues ellipses, alterne duos brillants, monologues poignants, grandes scènes chorales. Un tourbillon d’affects, de ressentiments, de secrets et de révélations.
Dans ce patchwork foisonnant toutes les scènes n’ont pas la même intensité, mais c’est comme ça que le temps passe, parfois fluide, parfois heurté, jours pleins ou creux.

2 mariages, 2 enterrements, 3 baisers, mille trahisons, sur une table urne funéraire et bouquet de mariage voisinent, c’est la vie, avec les conséquences lourdes ou légères des choix, des gestes et des mots. « Il y aura des naissances, il y aura des mariages, il y aura des funérailles, et ce sera bien », dit Anne. Il y a eu des naissances, des mariages, des funérailles, c’est la vie, c’est du théâtre, et c’est bien.
Un spectacle imparfait comme ses protagonistes, comme les vies humaines, imparfait, bancal, et tonique, et drôle, et poignant. Hautement réjouissant.

Marie-Hélène Guérin

 

LES CONSÉQUENCES
Au Théâtre de la Ville jusqu’au 15 novembre 2025
Texte et mise en scène Pascal Rambert
Avec Audrey Bonnet, Anne Brochet, Paul Fougère, Lena Garrel, Jisca Kalvanda, Marilú Marini, Arthur Nauzyciel, Stanislas Nordey, Laurent Sauvage, Mathilde Viseux, Jacques Weber
Lumières Yves Godin | Costumes Anaïs Romand | Musique Alexandre Meyer | Scénographie Aliénor Durand | Collaboration artistique Pauline Roussille

Production déléguée structure production. Coproduction TNB – Théâtre national de Bretagne, Rennes – Le Cratère, Alès – Festival d’Automne à Paris – Théâtre de la Ville-Paris – Bonlieu, Scène nationale, Annecy – Théâtre national de Nice – CDN Nice Côte d’Azur, Nice. Coréalisation Théâtre de la Ville-Paris – Festival d’Automne à Paris

Rambert aux Bouffes du nord : Perdre son sac, Ranger, aux deux extrémités de la vie d’adulte

Perdre son sac : la force d’un coup de poing rageur contre un mur
À 19h, on peut voir, interprété avec fièvre par Lyna Khoudry (déjà interprète pour Rambert dans Actrice, remarquée notamment pour son beau premier rôle dans Papicha), Perdre son sac, un court monologue, une diatribe lancée à la face du monde, où se jouent la colère contre le père, contre la société des pères – monde ultracapitaliste qui réduit une jeunesse fougueuse à l’esclavage des « bullshit jobs », contre l’abêtissement à portée de télécommande, mais aussi le sentiment amoureux comme arme de la lutte des classes, et la puissance du langage. C’est compact, touffu, on aurait aimé trouver plus de reliefs, de clarté et de complexité dans le texte comme dans le jeu, mais on peut aussi voir dans cette opacité monolithique la force désespérée d’un coup de poing rageur contre un mur.


Ranger : leçon d’humanité et de théâtre

Dans l’univers lisse, anonyme et chic d’une chambre d’hôtel de luxe, Jacques Weber (qui fut patriarche dans Architecture pour Rambert) s’empare avec maestria de la magnifique partition qu’il lui a composée.
De la puissance du langage, et du sentiment amoureux, il sera aussi question dans Ranger. De la singularité des êtres, de la façon de se trouver une place dans la société, de l’amour des pères et des mères. Ces récurrences traversent l’œuvre de Rambert, la hantent, y reviennent en discrètes allusions ou grandes lignes de force. Rambert n’apporte pas de réponse, mais confronte inlassablement ses personnages à ses interrogations.
On est à Hong-Kong, de nos jours. Dans une chambre immaculée, le grand écrivain est venu recevoir un Prix couronnant son œuvre, il est seul. Il est très seul, ou plutôt pas du tout : l’ombre de sa femme, morte il y a juste un an, l’accompagne. C’est à elle qu’il s’adresse, ils ont eu 55 ans de compagnonnage, un si long dialogue, ça ne s’interrompt pas comme ça. Mais un an sans elle, maintenant c’est assez.
« Ranger », ce n’est pas ce qui l’occupait durant sa vie, mais désormais, sa bien-aimée partie, il s’y attelle. Mettre de l’ordre dans les papiers, dans les souvenirs.
 
 

 
Le grand écrivain est fatigué de voir ce monde qu’il a rêvé plus beau, qu’ils ont rêvé de transformer, lui échapper, et ne pas être plus beau, plus en paix. Il est fatigué de ces combats menés en vain, et de l’absence de l’aimée. Ils ont été très amoureux, très complices, très insouciants, ont partagé la littérature, la drogue, les voyages, la politique, l’alcool, « un goût féroce pour la liberté ». Ils ont partagé la jeunesse et la vieillesse. « Deux choses que nous n’aurons pas trompées : notre couple et la littérature ».
Le grand écrivain ce soir a envie, besoin, d’encore une fois, comme autrefois, raconter sa journée à sa femme. Sa journée, et leur vie.
Avec une grande douceur, et une immense drôlerie.
Cachets, whisky, rail de coke, beaucoup de whisky, encore de la drogue… le grand auteur a choisi sa destination et son mode de transports. Mais rien de sordide ou d’amer en cela, Rambert sait alléger le tragique de tendresse et d’humour, et sa mise en scène de velours tient le glauque à distance. La modernité clinique de la chambre se réchauffe de quelque objet chargé de couleur ou d’affection – baroque bouquet de rose, ours en peluche venue de l’enfance de sa femme, bouteille de whisky mordorée, des pénombres enveloppantes rompent la lumière crue, de délicates parenthèses musicales sont subtilement tressées au récit. On écoute avec le grand auteur fatigué, salle et scène plongées dans la même nuit et la même attention, une chanson d’Aznavour ; sur un Stranglers suave et sépulcral, il danse, à nouveau jeune, souple, léger, d’une élégance chaloupée. Instants de grâce dans un spectacle intense.
 
 

 
Une lettre d’amour sera lue, la première lettre de leur histoire. Était-elle belle ? sans doute. Mais, au fond, c’est des décennies qui ont suivi qu’elle est belle. Voilà un cadeau précieux que de voir cela sur une scène, ce que le temps apporte de beauté à la vie, sachons en gré à Pascal Rambert.
C’est un texte d’une grande maîtrise, aux moirures changeantes, aux ombres fluctuantes, entre folle légèreté et tendre gravité qu’il a inventé pour Jacques Weber. Et de son grand corps qui a vécu, de sa voix au grain de rivière charriant des cailloux, l’acteur déambule dans sa chambre d’hôtel comme dans les mots de Rambert, avec une puissance lente, des gestes denses, une incarnation d’une évidence palpable.
Ranger, c’est un chant d’amour et d’adieu pudique et poignant, une immersion dans une intimité large comme un monde. Jacques Weber a de la retenue et de la générosité, une présence magnétique, la malice qu’il faut pour que le grave reste léger. Une leçon d’humanité et de théâtre.

Marie-Hélène Guérin

 

PERDRE SON SAC
Aux Bouffes du Nord à 19h jusqu’au 18 février
2023
Texte, mise en scène et installation Pascal Rambert

Collaboration artistique Pauline Roussille
Régie générale Alessandra Calabi
Régie lumière Thierry Morin
Répétitrice Hélène Thil

Avec Lyna Khoudri

RANGER
Aux Bouffes du Nord à 21h jusqu’au 18 février
2023
Texte, mise en scène Pascal Rambert

Collaboration artistique Pauline Roussille
Création lumières Yves Godin
Costumes Anaïs Romand
Espace Pascal Rambert et Aliénor Durand
Répétiteur José-Antonio Pereira

Avec Jacques Weber

Photos Louise Quignon

Revue de presse du 4 mai 2016 : La Dernière Bande, Pierre Ciseaux Papier et Pour que tu m’aimes encore

 

La dernière bande_affiche

 

1. Jacques Weber, sous la houlette de Peter Stein, délivre une Dernière Bande sombre et impressionnante. :

« La proposition qu’ont élaborée, à partir de La Dernière Bande, Peter Stein et Jacques Weber est de l’ordre d’un grand rendez-vous… la mise en scène de Peter Stein révèle l’essence même de l’œuvre de Samuel Beckett. Elle nous plonge dans un moment de théâtre bouleversant. » La Terrasse

« La tension constante qu’impose le metteur en scène – entre le présent et le passé, la voix vieille en live et la voix plus jeune enregistrée, la gestuelle burlesque de l’acteur et ses grognements de douleur – est remarquable. Jacques Weber est magistral, surhumain. » Les Echos

« Jacques Weber est impressionnant. Il puise profondément en lui-même les couleurs subtiles de cette tragédie minuscule où le grotesque le dispute aux inconsolables chagrins d’un vieil enfant. Superbe.. » Figaroscope

« Une Dernière Bande maximaliste. » Le Monde

« Jacques Weber incarne avec une force colossale les états d’âme, autant que les états de corps, de Krapp. La mise en scène de Peter Stein [est] très respectueuse des indications de Beckett. Au-delà de l’aridité inhérente à la pièce, cette version de « La Dernière Bande » est un impressionnant moment de théâtre. » Froggy’s delight

« La force du texte procède aussi de sa poésie. La mise en scène épurée ficelle le tout de façon redoutable. D’un grand texte seul un grand comédien peut restituer l’esprit. Jacques Weber dépasse cette proposition car il ne restitue pas seulement, il saisit, il ne joue pas la comédie, il est Krapp. » Toute la culture

« N’est pas métaphysicien qui veut. Pourquoi le grand metteur en scène Peter Stein a-t-il si peu, si mal dirigé Jacques Weber ? » Télérama

 

Pierre Ciseaux Papier-Affiche

2. Pierre Ciseaux Papier, de Clémence Weill, au Théâtre du Rond-Point étincèle ou irrite :

« Le texte de Clémence Weill est brillant, juste et percutant. Mais cet empilement de réflexions profondes est si dense qu’on est un peu frustré. il manque des espaces de respiration, de mise en situation… » Un fauteuil pour l’orchestre

« La jeune auteur Clémence Weill propose un univers original, patchwork d’inspirations puisées ça et là… elle a rencontré avec Laurent Brethome un metteur en scène finement complice. Dans une épuration élaborée, il sait traduire ce jeu complexe… » Artistik Rezo

« Vif, mordant, rapide, mais avec quelques longueurs de texte. Le jeu des comédiens est formidable… La mise en scène est originale et surprenante. » Culture Tops

« Un texte insipide. Brethome commet la lourde et incompréhensible erreur de faire semblant d’une mise en scène où régnerait l’épure… » Toute la culture

« Un spectacle qui se veut brillant ? Laurent Brethome tente bien d’éclairer le propos, notamment en insistant sur les accessoires, clés de l’énigme, mais peine à sauver cette pièce bavarde, à la construction peu convaincante. Trop de pistes ! Heureusement, les interprètes, chevronnés, gardent le cap, soutiennent le rythme vif et enlevé d’une partition réglée au cordeau. » Les Trois Coups

 

Affiche Pour que tu m'aimes encore

3. Seule en scène dans Pour que tu m’aimes encore Elise Noiraud offre sourires et nostalgie avec son (auto-)portrait d’ado :

« La Vie aime : passionnément. Grâce à ses dialogues qui font mouche et son aisance remarquable à interpréter tous les personnages, l’actrice signe un spectacle universel où chacun pourra se reconnaître. » La Vie

« Charmant et drôle. Elle donne vie à une dizaine de protagonistes. Elle les croque d’un trait sûr. Avec esprit, malice et beaucoup de sincérité. » Figaro

« Coup de cœur : une pêche et une justesse réjouissantes. » Le Pélerin

« Étonnante et terrifiante relation mère-fille qu’Elise Noiraud croque avec une énergie dévastatrice et une folie douce… Forte et tellement blessée. » Télérama

« Avec énergie, humour et sensibilité, un plongeon jubilatoire dans l’adolescence. » Figaroscope

« Un récit presque documentaire qui ne manque pas d’humour, [qui] parle du sujet avec intelligence, sans jamais sombrer dans le girly ou l’humour potache. » Time Out

« Un seul en scène sensible et tendre. C’est une réussite. Le public de tout âge rit et s’enthousiasme . » Toute la culture

LaDerniereBandeJacquesWeber

La Dernière bande à l’Œuvre… Bobine ! Bobiiiine !

La Dernière bande de Samuel Beckett – Spectacle vu le 16 avril 2016
A l’affiche du Théâtre de l’Œuvre jusqu’au 30 juin 2016
Mise en scène : Peter Stein
Avec Jacques Weber

 

La dernière bande_photo1

Dans cette courte pièce écrite par le prix Nobel de Littérature à l’âge de 52 ans, nous sommes projetés dans les derniers moments de vie de Krapp, écrivain âgé, myope et dur d’oreille. Il se remémore des souvenirs enregistrés depuis 30 ans, à sa date anniversaire sur un magnétophone d’époque.

Cette pièce est jouissive et tendue par de multiples paradoxes, liés tant à l’écriture de Samuel Beckett qu’à l’incarnation voulue par Jacques Weber et Peter Stein.

Le début de ce monologue se déroule sans que le comédien –travesti en clown, grâce aux costumes d’Annamarie Heinrich et au maquillage de Cécile Kretschmar, Jacques Weber est méconnaissable- ne prononce un seul mot, se livrant à un rituel de dégustation de bananes et de recherche de bobines dans un immense bureau –décor majestueux et épuré de Ferdinand Wögerbauer. Le public devient immédiatement le geôlier de cet animal qui lui renvoie l’image de sa propre prison !

 

La dernière bande_photo2

 

Le souvenir de la balade en barque avec une jeune amoureuse va hanter par trois fois l’esprit du vieil homme et là-encore ce sont les oppositions entre les différentes temporalités qui nous prennent aux tripes : le corps de l’homme affaibli, alcoolique, tordu entre deux quintes de toux, se confrontant à la vitalité et l’exubérance des émotions amoureuses qui surgissent sous nos yeux !

Enfin, l’histoire est rythmée par un humour imprévu, lié à des ruptures de langage et des mots qui sortent de nulle part ; la danse dans laquelle Krapp nous entraîne pour reconnaitre le mot « viduité » est une pure délectation.

Enfin, Jacques Weber est un Maître accompagné par un autre Maître Peter Stein.

Alors, pas d’hésitation, allez rembobiner la bande au Théâtre de l’Œuvre, et ce pour la dernière pièce programmée par son Directeur Frédéric Franck !

Magali Rosselo

 

Revue de presse du 21 octobre 2015 : Ce que le jazz fait à ma jambe, le poisson belge, Onomatopée et l’Avare

 

1. Jacques Gamblin fait swinguer le Théâtre du Rond-Point avec « Ce que le jazz fait à ma djambe! » :

– « Ce n’est pas un concert, ce n’est pas une pièce, ce n’est pas un seul en scène. C’est un peu les trois à la fois.« – France Info

– « Spécialiste des seuls en scène insolites (Entre courir et voler il n’y a qu’un pas papaTout est normal mon cœur scintille), Gamblin invite la musique sur scène et inscrit son texte sur des sons de blues, de groove, de punk.« – Le JDD

– « A remarquer parmi les sources littéraires du duo, des propos signés Herbie Hancock en personne. » – La Terrasse

– « Comédien incomparable et décidément inclassable, Jacques Gamblin se prête volontiers à toutes les expériences scéniques, partageant l’affiche avec le danseur Bastien Lefèvre ou le pianiste Laurent de Wilde.« – Telerama

 

2. Au Théâtre de la Pépinière, Léonore Confino offre à Marc Lavoine son premier rôle sur scène avec « le poisson belge » :

– « Si le thème de la rencontre improbable n’a rien d’original, son traitement par Léonore Confino déroute tout autant qu’il séduit.« – Froggy’s Delight

– « Littéralement, la rencontre accidentelle d’un travesti et d’une jeune orpheline, l’union inattendue de ces deux solitudes torturées devenant synonyme de force d’entraide » – Telerama

– « Dans la dernière pièce de Léonore Confino, Marc Lavoine fait des débuts sur scène très convaincants, et prometteurs.« – Le JDD

 

3. Dans le cadre du Festival d’Automne, quatre compagnies de Belgique et de Hollande, dont les fameux tg Stan, reprennent « Onomatopée » au Théâtre de la Bastille :

– « Fruit d’une  collaboration des compagnies flamandes et néerlandaises tg STAN, De Koe, Dood Paard et Maatschappij Discordia, Onomatopée a été créé en 2007 et débarque aujourd’hui en France. » – La Terrasse

– « Issus de compagnies flamandes et néerlandaises, cinq trublions en équilibre instable affrontent le public presque sans filet.« – Libération

– « De sujet il n’y a point, dans ce spectacle qui fait de la scène un champ d’action (ou plutôt de non-action) dadaïste.« – Le Monde

– « Un beau ratage, à l’opposé de leur fameux succès, My Dinner With André,qui mit autrefois (en 2005 et en 2014) les salles en transe !« – Telerama

 

4. Jacques Weber revisite « l’Avare » de Molière au Théâtre Dejazet :

– « Disons-le, le chef-d’oeuvre possède une telle puissance qu’il se développe de lui-même et que la mise en scène, si elle est conduite sans arrogance, ne peut que réussir. » – Blog.Le Figaro

– « Jacques Weber, comédien astral, mis en scène par Jean-Louis Martinell, joue ce rôle à la manière d’un Raimu : il aspire, dévore, concasse, renvoie dans un trou noir.« – Froggy’s Delight

– « On pensait naïvement que « l’Avare » était une comédie. Le metteur en scène Jean-Louis Martinelli voit plutôt dans ce classique de Molière un drame.« – Le Parisien

Interview de Jacques Weber pour le JDD