Revue de presse du 3 mai : Votre Maman, L’Abattage rituel de Gorge Mastromas, Eric von Stroheim

Votre Maman, de J.C. Grumberg, m.e.s. Charles Tordjman, avec Catherine Hiegel, Bruno Putzulu, Philippe Fretun et Paul Rias - Théâtre de l'Atelier - photo © Ch. Vootz @ Ch. Vootz

1. Un voyage poignant dans la mémoire, avec Votre Maman, de Grumberg, emporté par une Catherine Hiegel remarquable :

“La pièce est brève, mais elle dit beaucoup. Mise en scène avec justesse, elle commence sur le mode comique grinçant, puis, dans les dernières scènes, on est plongé dans la tragédie de la mémoire qui s’étiole, de la disparition physique et mentale des derniers témoins de la Shoah. Catherine Hiegel est remarquable dans ce rôle ardu. Sans pathos, avec grâce, presque légèreté, elle incarne la fin de vie brouillée d’une femme qui a beaucoup aimé, beaucoup souffert… morte juste avant d’avoir tout oublié. Le dernier échange entre le fils et sa mère nous laisse la gorge serrée. Les Echos

“La maman en question n’a plus toute sa tête, mais garde de la répartie. Campée par la formidable Catherine Hiegel, elle ne s’en laisse pas conter… On rit à ses frasques, avant que le sourire ne se fige, au fur et à mesure que la pièce file vers son sujet glaçant : les souvenirs épars de la Shoah qui remontent à la surface dans la mémoire trouée de la mère. Vieille dame indigne, rebelle et fragile, Catherine Hiegel est bouleversante dans le rôle de la mère. Une pièce brève et forte. Le Parisien

“Jean-Claude Grumberg sait dire sans raconter. Dans Votre maman, comme dans ses autres pièces sur le sujet, le passé est là, présent et indicible. … En un instant, [Catherine Hiegel] impose une présence, un personnage, une vie. L’une de nos plus grandes actrices. Le Monde

“Un spectacle attachant dont la loufoquerie fait fonction de masque pudique, servi par la mise en scène de Charles Tordjman, sobre et parfaitement accordée au rythme du texte et par des comédiens de grand talent. Catherine Hiegel est parfaite dans le rôle de la vieille dame. Le fils est interprété par Bruno Putzulu, très touchant ; il exprime avec justesse le désarroi et la solitude de son personnage… Cette nouvelle collaboration entre Grumberg et Tordjman confirme les affinités électives entre ces artistes qui ont l’art de traiter avec légèreté et grâce les sujets les plus graves. Webtheatre

“On retrouve l’humour noir de l’auteur servi par des comédiens talentueux et attachants. Bruno Putzulu, ancien pensionnaire de la Comédie-Française, retrouve son ancienne doyenne et circule entre eux une tendresse communicative. Le public rit beaucoup jusqu’au final où les gorges se serrent. Grumberg continue ici son travail sur le devoir de mémoire, tellement nécessaire. Toute la culture

“Une pièce toute en finesse. Catherine Hiegel et Bruno Putzulu forment un duo mère-fils des plus touchants. Jean-Claude Grumberg, par petites touches délicates et pudiques, drôles et virant à l’absurde, crée une atmosphère toute en vulnérabilité… L’auteur une nouvelle fois écrit sur la thématique qui tisse histoire et intimité, hantise et légèreté, brouillant le temps et l’espace. La mise en scène souligne au plus près les contours de cet univers, qui laisse affleurer l’émotion à travers l’humour et la subtilité. La rencontre entre Catherine Hiegel, d’une finesse sans pathos, et Bruno Putzulu, qui rayonne de tendresse, bouleverse le public. Artistik Rezo
 

L'abattage rituel de Gorge Mastromas, de Dennis Kelly, m.e.s. Maïa Sandoz - © Danica Bijeljac @ Danica Bijeljac

2. Maïa Sandoz monte avec vivacité L’Abattage rituel de Gorge Mastromas, une comédie grinçante et actuelle :

(à noter, actuellement, par Chloé Dabert, une autre mise en scène du même texte se joue au Rond-Point)

“Dennis Kelly est un esprit féroce qui met face aux réalités du moment. Maïa Sandoz met en scène avec malice. Aurélie Vérillon, fine et vive, est éblouissante. Adèle Haenel, qui aime travailler avec Maïa Sandoz, est, elle aussi, excellente, avec ce mélange de gravité et d’humour qu’elle distille avec délicatesse. Leurs camarades, unis et très personnels, servent avec vivacité le propos. Aussi noire soit l’inspiration de Dennis Kelly, le spectacle ne pèse pas. Il est souvent très drôle. On rit franchement. Maïa Sandoz a le sens des mouvements, des accélérations, des transformations rapides des images. Du théâtre libre, joyeux, enjoué qui repose sur une liberté bien tempérée. Figaroscope

“Dennis Kelly sait l’art d’éveiller aux turpitudes et au cynisme politique, économique de notre société libérale pas si avancée, qui pervertit volontiers l’individu. Maïa Sandoz a monté musicalement le texte à la structure éclatée, où le temps n’existe plus, où la forme labyrinthique reste énigmatique. Elle a opté pour un chœur d’acteurs, où les voix plurielles racontent, comme dans un kafkaïen procès, ce drôle de personnage tragique… Les acteurs jouent collectif et bien. On ne peut s’empêcher d’aimer particulièrement Adèle Haenel, farouche et rebelle. Télérama Sortir

“Cette pièce permet de voyager à l’intérieur de l’incarnation et de la mise à distance, offrant une grande richesse de déploiement aux interprètes.
entretien avec Maïa Sandoz La Terrasse

“La personnalité polymorphe de George est distribuée entre six acteurs, comme un chœur antique, qui font tourner la parole de sa biographie… Sur un plateau tournant, tel un ring, se déroulent des affrontements, professionnels, amoureux, familiaux… Abattage ? Oui, le sang coule, balafre les victimes, tache les mains. Indélébile. …le rire peut fuser, complice, amer, coupable de participer de cette mascarade généralisée qu’est notre société. Spectacle efficace, sans temps mort, d’une santé dérangeante propre à déciller les aveuglements contemporains. Spectacles Sélection

“La forme est très jubilatoire pour les comédiens. Elle est chorale. Les comédiens, galvanisés, sont excellentissimes. Aurélie Vérillon, idéal Tanagra, possède une très forte présence et un sens des nuances, des passages, tout à fait impressionnant. Adèle Haenel que l’on avait vue déjà excellente, entre les mains de Maïa Sandoz, possède le charme et la fantaisie qui conviennent. Les garçons aussi sont tous engagés, audacieux, libres et rigoureux à la fois, tous. On rit beaucoup. La pièce est très allègre, mais répétons-le très cruelle. Un théâtre d’aujourd’hui dans le fond comme dans la forme. Rare, si rare ! Le Grand Théâtre du Monde, Armelle Héliot
 
Eric von Stroheim, de Christophe Pellet, m.e.s. Stanislas Nordey, avec Emmanuelle Béart, Thomas Gonzalez, Laurent Sauvage - Théâtre du Rond-Point - © J.L. Fernandez @ JL Fernandez

3. Stanislas Nordey met en scène au Rond-Point, Eric von Stroheim, de Christophe Pellet, trio troublant :

“Stanislas Nordey magnifie l’audacieux poème érotique de Christophe Pellet. Cru, porté par un trio de feu, le spectacle bouscule et bouleverse. Le jeu puissamment distancé des comédiens décuple la force des mots. La pièce devient opéra des sens, porté par trois acteurs en apesanteur. Laurent Sauvage émeut dans la peau du « harder » fatigué. Thomas Gonzalez a l’allure d’un dieu grec, venu sur terre pour se frotter à la nature, à la vie. Emmanuelle Béart est sublime en maîtresse-femme blessée, mélange d’autorité, de tristesse et de sensualité. On ne sort pas indemne de ce court spectacle énigmatique et troublant. Les Echos

“Portés par une mise en scène formidable, les trois comédiens rayonnent. La langue, démonstrative ou elliptique, fait toujours à elle seule spectacle. Comme dans le meilleur du grand répertoire. Pellet cherche. Nordey cherche. Ses acteurs cherchent. Et leur quête partagée rayonne. Tous trois ont choqué, troublé, fasciné, apaisé le public. Avec un lyrisme, une émotion qu’on n’avait encore jamais vus dans les spectacles de Stanislas Nordey, en pleine maîtrise d’un art électrique et fulgurant. Et ce lyrisme-là emporte et embrase. Télérama

“Comme souvent dans le théâtre de Stanislas Nordey, il y a les mots, la densité de l’écriture. Pourtant, dans « Erich von Stroheim », c’est autre chose qui marque de son empreinte les enjeux de la représentation. C’est un corps. Le corps nu du jeune acteur Thomas Gonzalez. Il impose sa présence physique au sein d’une scénographie alliant dépouillement et monumentalité. On est loin, dans cette mise en scène d’une grande intelligence, des recettes éculées qui dévêtissent certains interprètes pour provoquer les rires ou mettre à mal les pudeurs. La nudité que convoque ici Stanislas Nordey est ample, exigeante, agissante. Stanislas Nordey trouve le point d’équilibre entre stylisation et corporalité. Son « Erich von Stroheim » regorge d’une puissance insolite. La Terrasse

“La pièce est violente, âpre et audacieuse, elle dérange, taraude et questionne. Le propos est radical, le texte parfois cru. La mise en scène tendue de Stanislas Nordey renforce le poids des mots. Enchâssé, sinon écrasé par le décor spectaculaire qui s’ouvre et se referme comme un objectif, le texte accuse ses (quelques) fragilités mais le huis clos y résonne obstinément. Formidablement présente et engagée, Emmanuelle Béart incarne cette femme dominatrice avec une force magistrale face à ses deux valeureux partenaires. Le Journal du Dimanche

“Stanislas Nordey cadre le désert sentimental de ce trio sexuel dans la démesure lyrique de deux immenses battants qui s’ouvrent et se ferment en n’embrassant que des espaces vides. Le strip-tease des âmes s’avère une voie sans issue, une fabrique de coquilles creuses, qui dénonce notre monde de la marchandisation… La désillusion est sans appel pour ceux qui osent tomber le masque. Romantiques s’abstenir. Les Inrocks

“Une écriture incisive, âpre, violente, rythmée. Un poème noir, à l’humour féroce et à la langue fragmentée qui interroge en creux le monde d’aujourd’hui, la relation à l’autre, le désir et le travail. Il questionne aussi l’enfance fracassée et la perte d’innocence. Stanislas Nordey orchestre d’un geste sûr et puissant cette danse de mort dont la fureur des mots magnifiquement rendus, résonne de cette compromission impossible. Des corps qui habitent la langue et une langue qui percute le corps, telle est la partition que servent à merveille les trois comédiens dans un abandon aussi troublant que poignant. Bravo. Publik’Art

0 réponses

Répondre

Se joindre à la discussion ?
Vous êtes libre de contribuer !

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *