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La Maison de Bernarda Alba à la Comédie-Française, mise en scène Lilo Baur

Spectacle vu à la Comédie-Française – Salle Richelieu, le 2 juillet 2015
Reprise du 2 octobre 2015 au 6 janvier 2016
Mise en scène Lilo Baur

 

© Brigitte Enguérand

 

L’occasion, assez rare finalement, de découvrir La maison de Bernarda Alba, cette “vraie pièce de femmes”, dans une mise en scène très énergique, servie par dix comédiennes exceptionnelles du Français

 

Comme l’a fait remarquer Cécile Brune, La maison de Bernarda Alba de Federico Garcia Lorca, pièce bien connue des troupes amateurs est très peu programmée par les scènes nationales. A la Comédie-Française par exemple, il faut remonter à 1974, avec le spectacle de Robert Hossein qui avait confié le rôle d’Adela à la jeune pensionnaire…Isabelle Adjani !

Lilo Baur a déjà monté un spectacle au Français : c’est à elle que l’on doit “La (formidable) Tête des Autres” au Vieux-Colombier. Nouveau challenge, nouveau lieu pour cette metteure en scène tellement contemporaine. Grâce à un sublime décor architectural, elle parvient à transplanter le plateau de la Salle Richelieu aux fins fonds de l’Andalousie.
Premières en scène, sur fond de glas annonçant l’enterrement de l’homme de la maison -le deuxième mari de Bernarda Alba- apparaissent Claude Mathieu en servante et Elsa Lepoivre en Poncia. Cette dernière est méconnaissable, pas tant par le grimage que par son jeu : elle est l’un des personnages qui nous font rire, en dépit de l’ambiance souvent pesante.  Surviennent ensuite Bernarda –formidable Cécile Brune – et ses cinq filles. Angustia l’aînée, interprétée par une Anne Kessler tordante, et dont il convient de souligner, en plus de son talent habituel, l’incroyable travail qu’elle a dû fournir en reprenant au pied levé le rôle de Véronique Vella. Coralie Zahonero et Claire de la Rüe du Can sont respectivement Magdalena et Amélia, les deux sœurs inséparables. Jennifer Decker s’est glissée dans le costume de Martirio la bossue, tandis que la benjamine Adela est incarnée par la si touchante Adeline d’Hermy.

Les voici toutes cinq contraintes par leur abominable mère à observer une période de huit années de deuil. Soucieuse du qu’en dira-t-on, Bernarda Alba n’hésite pas à élever la demeure familiale au statut de prison. N’a-t-elle pas pour habitude d’enfermer sa propre mère totalement folle dans un cachot? Cachot dont parvient parfois à s’échapper la pauvre Florence Viala (aussi méconnaissable que drôle, elle aussi).

Aucun homme dans ce huis-clos ? Un seul, si, et qui fera le malheur de toutes… Pepe le Romano, que Lilo Baur a choisi de nous montrer sous les traits d’Eliott Jenicot – rappelons que d’après le texte de Lorca, ce personnage n’est jamais en scène. Pepe le Romano, promis à Angustia, la plus argentée des filles (la seule!) née d’un premier mariage et ayant hérité de son père. Pepe le Romano qui séduit la jeune Adela pendant la période de ses fiançailles. Pepe le Romano dont Martirio tombe éperdument amoureuse. Un seul homme pour tant de femmes. Unique objet de tous les fantasmes.

Tant de passions inassouvies déboucheront forcément sur le pire. Peu à peu, on sent poindre le drame, aussi clairement que l’orage qui explose à la fin d’une journée d’été…

Encore une vingtaine de jours pour ce voyage dans l’Andalousie de ce début de siècle :

1 – Voyage en excellente compagnie : les dix comédiennes du Français sont toutes incroyables.
2 – Voyage dans l’univers à la fois poétique, charnel, énergique et percutant d’une Lilo Baur inspirée.
3 –  Voyage dont l’on ne ressort par indemne : force est d’admettre que cette “condition de la femme” pointée du doigt par Lorca est encore bien trop souvent bafouée en 2015…

 

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INTERVIEW

 

 

Cécile Brune, près d’un quart de siècle au Français

Elle est capable d’incarner à merveille la monstrueuse Bernarda Alba, autant que de nous faire rire aux larmes dans la Dorine de Tartuffe

Cécile Brune, on a l’impression de la connaître depuis bien longtemps. Sa voix remarquable, reconnaissable entre mille vous accueille chaleureusement. Une bise plus tard, me voici dans sa loge. Sans doute la plus belle de la Comédie-Française. Double exposition sur les jardins du Palais-Royal. Une vue à tomber à la renverse. Un havre de paix. Un endroit chargé de souvenirs. Des souvenirs liés à son “quasi-quart de siècle” passé au sein de la maison de Molière.

Engagée en avril 1993 par Jacques Lassalle, elle a connu cinq administrateurs à ce jour. La saison qui s’achève lui aura offert des rôles aussi différents que la Bernarda Alba de Garcia Lorca, la Dorine de Molière, la baronne de Champigny de Labiche, la philosophe Ella de Dea Loher… Une saison à l’image de sa carrière, qui lui a permis d’enchaîner des rôles tels que le Fantasio de Musset, l’Araminte de Marivaux, l’Elmire de Molière, l’Andromaque de Racine, la Marceline de Beaumarchais, la Fausta de Claudel, l’Hélène de Rilke, la Rodogune de Corneille, la Princesse Negroni de Hugo, la Louise Miller de Schiller, l’Amandine Landerneau de Feydeau… Et tant d’autres encore. Découvrant au gré de l’alternance les rôles tragiques que les metteurs et scène ont plus souvent tendance à lui proposer. Se découvrant un énorme potentiel comique – elle en est la première surprise – lorsqu’un Feydeau ou un Molière lui “tombe dessus”.

Cécile Brune se décrit comme une nostalgique, une angoissée (“parfois même un peu trop”, ajoute-t-elle). Nous, spectateurs, ne la percevons pas comme telle. Car elle parvient à transcender cette angoisse. Pour dévoiler la passionnée qu’elle est. Passionnée de musique (de piano particulièrement) de cinéma (sa culture cinématographique est impressionnante!) de paysages (des Îles Chausey à la côte amalfitaine). Passionnée de vie tout simplement. Car Cécile Brune est avant tout une formidable curieuse et croqueuse de vie.

 

INTERVIEW

La maison de Bernarda Alba, Semianyki Express, Liliom et Extinction

Revue de presse du 3 juin 2015

 

 

1. La maison de Bernarda Alba à la Comédie-Française dans une mise en scène signée Lilo Baur :

– “Un huis clos féminin captivant qui dénonce le verrouillage de la société espagnole sous Franco.” – L’Express

– “La distribution est impeccable, de Martirio, la soeur dévorée de jalousie (Jennifer Decker) à l’impitoyable Bernarda (Cécile Brune).” – Le Point

– “Lilo Baur ne cache pas qu’en mettant en scène pareille pièce, elle a songé à toutes ces femmes humiliées de par le monde en raison de lois iniques ou de préceptes moraux infâme.” – Marianne

– “Tout est beau et profond dans ce spectacle où même la splendeur de la scénographie d’Andrew D Edwards, subtilement éclairée par Fabrice Kebour, n’a rien d’ornemental puisqu’elle ne fait que prolonger le geste de Garcia Lorca : conférer à l’enfer une beauté salvatrice” – Le Monde

 

2. Le nouveau spectacle de la troupe de clowns russe “Les Semianyki” débarque au Rond-Point :

– “Dans ce train en marche, rien ne fonctionne comme prévu : la cantatrice s’envole dans une pluie de confettis, deux vieilles stars du muet rivalisent de minauderie, les serveuses font trembler les bouteilles...” – Paris Normandie

– “A la manière de “La croisière (ferroviaire) s’amuse (sous la neige)”, les Semianyki se livrent à une jubilatoire farandole.” – Froggy’s Delight

– “Moins puissante que le phénoménal Semianyki (« famille » en russe), cette nouvelle création est pleine de rêve et de poésie, avec ses clins d’œil au cinéma des années 20, et démontre que la troupe sait se réinventer à un très haut niveau d’exigence.” – Telerama

– “On retrouve bien la bande des six dans ­différents personnages, du chef de train, barman ou serveuse, mais la machine comique semble s’être enrayée.” – Les Echos

 

3. Reprise de Liliom à Odéon-Berthier, dans une mise en scène de Jean Bellorini :

– “Un orchestre et une troupe unie, une délicatesse dans la direction d’acteurs, une joliesse dans les décors et les lumières (signés du metteur en scène lui-même), on retrouve dans ce spectacle la manière Bellorini, et cette manière est particulièrement en harmonie avec la pièce de Ferenc Molnar.” – Le Figaro

– “Bellorini crée un univers hypnotique entre mélodrame forain, cirque ambulant (irrésistibles gendarmes-détectives du ciel) et comédie musicale mélancolique.” – Les Echos

– “Jean Bellorini applique ses fondamentaux que sont le rejet de l’illusion théâtrale à laquelle il substitue le théâtre d’histoires à la manière de l’histoire du soir racontée aux enfants.” – Froggy’s Delight

 

4. Et reprise d’Extinction, au Théâtre de l’Oeuvre avec le formidable Serge Merlin :

– “Les aventures exceptionnelles, au théâtre, ne sont pas forcément celles qui font le plus de bruit. Ainsi en va-t-il du chemin que parcourt le comédien Serge Merlin, depuis vingt ans, en compagnie du grand écrivain autrichien Thomas Bernhard.” – Le Monde

– “Immense texte et immense acteur, épaulé avec talent par Blandine Masson et Alain Françon, qui captive plus d’une heure durant, le corps et le visage toujours en mouvement, d’une rage sourde et profonde.” – Froggy’s Delight

– “Rares sont les acteurs qui savent, comme Serge Merlin, restituer sur scène la prose de l’écrivain autrichien.” – Libération