Cartoon (ou Ne faites pas ça chez vous !)

Dans un bien joli décor de maisons de poupée format « pavillon de banlieue 1/1 », vit la famille Normal ; Norman et Norma, les radieux parents, 2,4 enfants (Dorothy, l’aînée, Jimmy, le cadet, et un bébé), un gros chien et un (gros) poisson rouge dans un gros bocal.
Une famille tout ce qu’il y a de plus normale. La journée commence, Papa lit le journal, maman donne le biberon à bébé avant de partir au travail, Dorothy houspille son frangin, et Jimmy est toujours le petit nouveau au collège. Tous les jours ? oui, tous les jours. Ah mais comment peut-on être TOUS les jours le petit nouveau ?

C’est que la famille Normal ressemble à une famille normale, mais vit selon des règles PAS DU TOUT normales… Bébé n’a toujours pas de prénom mais parle, comme le chien, et le poisson (qui lui a un prénom, il s’appelle Sushi). C’est que ce sont des cartoons : comme Woody Woodpecker et Bipbip le Coyotte, comme Grizzy et les lemmings, comme les Poussins de Claude Ponti, ils ne ressentent jamais la douleur. Ils ne vieillissent pas, et ne meurent jamais, jamais… et chaque matin tout redémarre à zéro. Tremblement de terre, électrocution, explosion de gaz, l’épisode suivant les ramène intacts au petit-déjeuner, Papa lit son journal, maman donne le biberon et caetera.

« Tous les jours un nouvel épisode
Inédit.
Repartant de zéro.
Tout peut arriver
Absolument tout.
On est allés dans l’espace.
En Afrique.
Sur la Lune.
Au milieu des dinosaures.
Et dans toutes les grandes capitales du monde.
On a eu des super-pouvoirs.
Deux fois.
On a été rapetissés.
On a été des géants.
On a été hantés.
On a été des fantômes.
On a été célèbres.
Tout peut arriver
Absolument tout.
Si ce n’est que.
On ne vieillit jamais.
On n’est jamais blessés.
On ne ressent jamais la douleur.
Et jamais
Jamais
Jamais
On ne meurt. »

Jusqu’à ce qu’un grain de sable dans l’engrenage… Maman Norma Normal, génie de profession, et donc comme il se doit tête en l’air, ramène une fiole expérimentale à la maison… Bébé en boit (devient invisible, tout ou partie), Jimmy en boit (se met à ressentir des choses – notamment quand on le frappe avec une poêle à frire ou qu’on devient son ami), le poisson rouge en boit (devient muet). Et le lendemain, ça ne reprend pas à zéro, bébé est toujours invisible, Jimmy change et y prend goût, et le poisson ne pipe toujours plus mot. L’heure des remises en question sonne pour la famille Normal !

Familière de l’univers de Mike Kenny , auteur jeunesse britannique dont elle a déjà mis en scène plusieurs textes, Odile Grosset-Grange renverse le rêve enfantin de devenir un héros de dessin animé cul par-dessus tête, et nous tend en miroir un héros de dessin animé qui aimerait devenir un enfant. On sait au moins depuis La Petite Sirène que quitter la fiction pour le réel a un prix… Mike Kenny et Odile Grosset-Grange, eux, n’ont pas le tragique en ligne de mire, mais la vitalité ! « si on arrêtait d’être des cartoons, on mourrait ! – oui, mais en ayant vécu ! »

« Quand je vais dans des classes, je dis toujours aux enfants et aux jeunes que je rencontre que ce qui me plaît par-dessus tout au théâtre, c’est que tout y est possible. Avec Cartoon, nous allons tester ensemble les limites de cette affirmation… » propose Odile Grosset-Grange. Alors elle pioche dans le magnifique coffre à jouets du théâtre pour en sortir des marionnettes et du dessin animé, un spectaculaire décor à transformation mêlant vidéo et construction, des cascades, des gags, des chansons, des courses poursuites et de l’émotion ! Un vrai feu d’artifice(s) au service d’un joyeux spectacle, qui pose, l’air de rien, des questions aussi simples qu’essentielles, comme celles que savent si bien poser les enfants : qu’est-ce qu’être normal ? est-ce que vouloir trop protéger autorise à empêcher de vivre ? est-ce que recommencer éternellement sa « journée de la marmotte », c’est une vie ? si au bout, il y a la mort, est-ce qu’être vivant vaut le coût ? mais est-ce que ne pas vivre vaut le coût de ne pas mourir ?

Un spectacle pour petits – mais pas trop petits – et grands, au rythme effréné soutenu par le jeu survitaminé des acteurs au top joliment vêtus de costumes pop pleins de peps, pour explorer de manière ludique et réjouissante des questions existentielles entre deux éclats de rire.

Marie-Hélène Guérin

 

 

CARTOON ou N’ESSAYEZ PAS ÇA CHEZ VOUS !
Un spectacle de La Compagnie de Louise
Au Théâtre Paris Villette jusqu’au 5 janvier 2025
À voir en famille à partir de 7 ans
Texte Mike Kenny | Traduction Séverine Magois
Mise en scène Odile Grosset-Grange
Avec François Chary, Julien Cigana, Antonin Dufeutrelle, Delphine Lamand, Pierre Lefebvre-Adrien, Pauline Vaubaillon
Assistant à la mise en scène Carles Romero-Vidal | Régie Générale de création Nicolas Barrot | Régie Générale Farid Laroussi en alternance avec François Michaudel | Lumières (création et régie) Erwan Tassel | Stagiaire Lumière Tom Bouchardon | Scénographie Stephan Zimmerli assisté d’Irène Vignaud | Dessins Stephan Zimmerli | Accessoires Irène Vignaud | Conception Machinerie et Magie Vincent Wüthrich | Conseil Marionnettes Brice Berthoud | Fabrication Marionnettes Caroline Dubuisson | Création Musicale et Son Vincent Hulot | Régie Son Vincent Hulot en alternance avec Camille Urvoy et Sébastien Villeroy | Costumes Séverine Thiebault | Création Perruque Noï Karunayadhaj | Chorégraphe Gianni Joseph | Plateau / Vidéo Emmanuel Larue | Plateau Marion Denier | Construction des Décors et machinerie Jipanco | Direction de Production / Diffusion Caroline Sazerat – Richard | Chargées de Production Mathilde Göhler ; Emilienne Guiffan | Diffusion Caroline Namer | Presse Elektron Libre – Olivier Saksik

Photos © Christophe Raynaud de Lage

Production La Compagnie de Louise / coproductions La Coupe d’Or – Théâtre de Rochefort, La Coursive – Scène nationale de La Rochelle, Théâtre d’Angoulême – Scène nationale d’Angoulême, OARA (Office artistique de la Région Nouvelle-Aquitaine), L’Odyssée – Théâtre de Périgueux, Théâtre de Gascogne – Scènes de Mont de Marsan, Ferme du Buisson – Scène nationale de Noisiel, Théâtre de Sartrouville et des Yvelines – CDN, Les Tréteaux de France – CDN / coproductions – fonds de soutien Fond de soutien à la production mutualisé de S’il vous plaît, Scène Conventionnée de Thouars, les 3T – Scène conventionnée de Châtellerault, Scènes de Territoire – Scène conventionnée du Bocage Bressuirais, Fonds de production jeunesse Nouvelle-Aquitaine en coopération avec la DRAC Nouvelle-Aquitaine / soutiens Adami, Fonds d’Insertion professionnelle de l’École supérieure de théâtre de l’Union – DRAC Nouvelle-Aquitaine et Région Nouvelle-Aquitaine / accueil et soutien en résidence Théâtre d’Angoulême – Scène nationale, Ferme du Buisson – Scène nationale, OARA dans le cadre de la Résidence Méca, La Coupe d’Or – Théâtre de Rochefort, Théâtre de Sartrouville et des Yvelines – CDN / accueil le soutien complémentaire de la Direction générale de la création artistique / La Compagnie de Louise est soutenue pour son projet par La Ville de La Rochelle, Le Département de la Charente-Maritime, La Région Nouvelle-Aquitaine et le Ministère de la Culture – DRAC site de Poitiers. La Compagnie de Louise est conventionnée par le Ministère de la culture – DRAC Nouvelle-Aquitaine Site de Poitiers

Machine de cirque : remède à la mélancolie !

Six ébouriffants circassiens québécois enflamment la Scala !
La jeune compagnie canadienne Machine de cirque, déjà passée par ici (en 2019 et 2021) et repassée par là (jusqu’au 5 janvier) vient secouer le public, de 5 à 105 ans – ravi et qui en redemande. D’éclats de rire en frissons, d’instants de poésie en prouesses virevoltantes, ils ne s’accordent (et ne nous accordent) aucun répit.

Sur le vaste plateau, patiente une spectaculaire scénographie, une fabuleuse « machine de cirque », quelque chose comme un drôle de chantier délaissé pour la nuit, de bric et de brocs, avec lampadaire, échafaudages, antenne et câbles électriques, bâches et seaux, un chantier délaissé par ses ouvriers, mais déjà tout bruissant de grondements citadins, d’éclairages crépitants, de fumées mouvantes. La machine piaffe d’impatience à la perspective d’être bientôt animée par une bande de farfadets joueurs et inventifs bien décidés à exploiter le moindre recoin de cet agrès urbain. Un compère créateur de son, poly-instrumentiste, batteur fou – voire fou furieux, souffleur d’accordéon à bouche, percussionniste sur dos, sur tubes, sur tout ce qui peut se marteler, frapper, scander, guitariste, fredonneur, les accompagnent, les rythment et les dopent – si besoin était…
Les six jeunes gens, gaillards athlétiques ou sveltes échalas, envahissent l’espace de haut en bas, de bas à haut, de long en large, offrant une prestation généreuse et allègre. Du cirque sans clown, mais où l’humour du clown est partout, tressé aux acrobaties les plus techniques, aux fantaisies sonores ou visuelles les plus excentriques.

Un cycliste lunaire se lance dans une aérienne danse sur un vélo rouge vif et léger, défiant toutes les lois de la pesanteur d’un air rêveur. Au trapèze, à la planche coréenne, escaladant les trois étages de l’échafaudage, enchaînant d’impressionnantes suites de vrilles, jonglant aux quilles ou… à la serviette de bain – savoureuse burlesquerie !, rivalisant d’audace et de fantaisie, ils gardent toujours une magistrale fluidité, une inaltérable fraîcheur et un sens du collectif réjouissant.

Leur agilité rieuse, leur complicité, leur rapidité tout en souplesse feraient presque oublier la virtuosité dont ils font preuve. C’est beau, tonique, gai, joyeux, époustouflant. Le public s’enthousiasme, se bidonne, s’émerveille, et finit en ovation debout. Cette Machine de cirque offre un beau cadeau : du plaisir ! Ne nous en privons pas !

Marie-Hélène Guérin

 

MACHINE DE CIRQUE
à La Scala
Idée originale, écriture du spectacle, direction artistique et mise en scène Vincent Dubé
Collaborateurs à l’écriture et à la mise en scène Yohann Trépanier, Raphaël Dubé, Maxim Laurin, Ugo Dario, Frédéric Lebrasseur
Avec William Borges, Olivier Buti, Francis Gadbois, Andris Jagudits et Matthes Speidel
Musicien (en alternance) Jérémie Carrier, Olivier Forest et Frédéric Lebrasseur
Conseillers artistiques Patrick Ouellet,Harold Rhéaume et Martin Genest | Musique Frédéric Lebrasseur | Conseillères à la scénographie Josée Bergeron-Proulx, Julie Lévesque et Amélie Trépanier | Costumes Sébastien Dionne | Éclairages Bruno Matte | Son René Talbot | Ingénieur mécanique David St-Onge | Direction technique Patrice Guertin

Une production Machine de Cirque et Temal Productions
Soutiens : Conseil des Arts et des Lettres du Québec 
Conseil des Arts du Canada 
L’entente de développement culturel intervenue entre le gouvernement et la ville de Québec 
Délégation générale du Québec à Paris
Partenaires France.tv

Drame Bourgeois : un amour, des mots

« Drame Bourgeois,
C’est Louis et L.
C’est elle et lui.
C’est deux solitudes.
C’est deux itinéraires, deux errances entre deux saisons, entre deux villes, entre deux histoires.»
Padrig Vion

Ils se croisent juste au cœur de Paris, quelques pas sur ce vieux Pont-Neuf, elle est autrice, des mots plein la tête, il est musicien, des notes plein la bouche ; L habite dans le VIe arrondissement de Paris, elle part pour Londres, Louis habite rue de Rennes, c’est aussi dans le VIe, il y revient après une soirée.
Leurs chemins se croisent, leurs regards, brièvement ; un accident de parcours, un presque-rien. Un grain de sable, un éclat de lumière qui s’incrustent dans un coin de leurs têtes. Et chacun continue, emportant ce grain de sable, cet éclat de lumière, pierre sur laquelle chacun bâtira leur roman d’amour et de désamour.

« Le point de départ de ce projet : une géographie de l’âge et de la classe »
Padrig Vion

 

Un « lui », une « elle », ça commence bien plus loin que leur présent, bien plus loin que leurs corps-là sur ce Pont-Neuf. Un lui, une elle, ça commence ailleurs, dans l’enfance, dans l’enfance des parents, dans la décoration de la chambre d’enfant, dans les livres de la bibliothèque des parents, dans les discussions pendant les repas de famille, dans ce qu’on a dû aller chercher et ce qu’on avait d’emblée.

Padrid Vion, tout jeune diplômé du Conservatoire national supérieur d’art dramatique, acteur, auteur, metteur en scène, a écrit Drame Bourgeois pour Lomane de Dietrich et Louis Battistelli, qui étaient dans la même promotion que lui au Conservatoire.
Padrig a grandi près de Nantes, en Bretagne. Il est « monté à Paris ». Il avait des bouquins de Marguerite Duras et de Roland Barthes plein les poches. Il a la curiosité, l’intelligence, il a les mots et la culture. Mais les mots, la culture, il est allé les chercher, dans les livres, dans les films. Il s’est emparé de Truffaut et Léaud, de Christophe Honoré et Louis Garrel, de Sautet, de Desplechin. Comme d’une nourriture, il en a fait sa chair. Lomane et Louis viennent du sixième arrondissement. Ils sont parisiens, ils sont plus que parisiens, ils sont la bourgeoisie parisienne, ils ont, ils sont l’aisance, la connivence, de leur milieu. Pour Padrig ils sont autant la classe méprisée que le lieu désiré.

Alors Drame Bourgeois, c’est une histoire d’amour, enfin, une histoire d’idée de l’amour, un jeu de construction du sentiment amoureux, du couple, de la fin du couple – puisque nous ne pouvons plus faire comme s’il n’y avait rien après « ils se marièrent et vécurent heureux ». Ils se marièrent et vécurent heureux, puis découvrirent que ce qui les attendrissaient les exaspèrent, puis découvrirent que la famille de l’autre les agace, puis découvrirent que gamins ils n’avaient pas aimé les mêmes dessins animés et qu’ils n’avaient pas la même conception de l’éducation parentale ; mécanismes du sentiment amoureux démontés et étalés comme les pièces d’un réveil qu’on veut réparer, et quand on le remontera il en restera deux ou trois qu’on ne sait plus où mettre, où diable allaient-elles, peu importe de toutes façons ce truc est ruiné.

Mais c’est aussi, c’est beaucoup, une histoire de langage. L et lui, l’autrice et le musicien, dans leurs pérégrinations sentimentales sont compositeurice, auteurice, manient le verbe avec gourmandise, jonglent et inventent, s’en servent d’appât et de charmes pour en tricoter un joli moment, dessiner une étreinte sensuelle… Et finiront par se moquer des travers ou des manies de l’autre, se jeter à la figure cuistreries ou inexactitudes, la caresse des mots devenue gifle. Car l’amour est affaire de chimie, d’alchimie, de corps, de cœurs, mais l’amour est aussi affaire de langage, qui est là où se nichent profond nos passés, nos milieux, nos apprentissages, nos familles, nos contrées.

 

« Tu es entré dans ma chambre de petit garçon et tu as critiqué la tapisserie.
Mais toi, tu n’as pas de passé, toi, ton histoire est trop moderne, les murs sont neufs »
Louis, Drame Bourgeois

 

Padrig Vion offre à ses personnages une langue à la fois très orale et très littéraire, de ruptures et de silences, d’élisions, de syncopes, de rythmes. Son écriture très musicale valse de contrepoint en mouvement concertant, de chœur en canon, joue des mots avec poésie et malice, on se délecte d’un « Déjà je pleus », d’un « Je m’assis je m’assois je m’assieds je m’installe ».
Il s’amuse à tracer une cartographie fantaisiste et amoureuse d’un Paris où « la distance se mesure en souvenirs »… On s’avance dans la rue du Cherche-midi à quatorze heure, on quitte la rue du Regard, on se promène rue Notre-Dame des champs, en venant de Strasbourg Saint-Denis on hésite entre prendre la rue du Paradis à gauche ou rue de la Fidélité à droite (à Paris, l’une mène réellement à l’autre)…


L’écriture ciselée de Padrig Vion exige beaucoup de rigueur : les deux interprètes sont précis, ont une grande maîtrise, et une belle finesse de jeu. Ils entrent dans l’histoire avec comme un détachement ; peuvent sembler cérébraux, la mise en scène, menée par l’auteur lui-même, les tient à distance aussi, en chassés-croisés qui parfois les rapprochent mais souvent les éloignent – silhouettes très verticales qui découpent net l’espace très nu du plateau – mais le jeu s’ancre, et s’incarne. La passion, plus encore : la colère, la rancœur, désordonnent ces rouages délicats. L’eau qui dort s’emballe en flots impétueux d’enrage.

Il est « gauche et discret », un peu dégingandé. Il porte des baskets dont il aime beaucoup le blanc, il est moins grand qu’elle, il donne les heures de la liturgie chrétienne « Neuf heures, tiens, Saint-Sulpice donne déjà la tierce ». Elle a l’allure dégagée, voix un peu basse, articulation claire. L est ce genre de grande fille qui porte un trench rouge comme s’il était beige, flammèche ignorant avec désinvolture qu’on ne voit qu’elle, ce genre de fille jambes longues cheveux négligemment impeccables qui sait quel film, quelle expo on peut aimer. Louis, L, mariage exogène, deux courbes qui se croisent peut-être se recroiseront mais n’arriveront pas au même endroit.

Graeme Allwright, qui promène dans ce Drame Bourgeois ses « jolies bouteilles » et sa mélancolie pleine de légèreté, – un chanteur que Louis aimait, un chanteur qu’L ne connaissait pas – les fait fredonner a capella « L’amour est joie, l’amour est beauté / Ainsi les fleurs en leur matin / Mais l’amour passe et disparaît / Comme de la fleur, rosée d’été. »

Ils s’accorderont d’ultimes retrouvailles, hasard, chacun avec son nouvel aimé.
Un frôlement d’épaules, deux corps qui se touchent, enfin, un temps suspendu, se glisse là une poignante émotion.
Il y a quelques pas de danse, c’est très gai, très triste et très gracieux. Un auteur et des interprètes subtils, à suivre.

Au Théâtre Ouvert, on peut voir aussi, qui forme diptyque avec Drame Bourgeois, Murmures : « Parler de l’amitié. Cette famille choisie qui ne l’est pas toujours tant, les sacrifices, les compromis qu’elle exige, parfois plus qu’en amour. […] Explorer les limites floues et les zones d’ombres de l’amitié́… », en dit Padrig Vion. On y retrouvera, à n’en pas douter, le talent de Lomane de Dietrich en duo/duel avec Mélodie Adda, et les mots et la finesse d’observation et d’écriture de Padrig Vion.

Marie-Hélène Guérin

 

DRAME BOURGEOIS
Au Théâtre Ouvert jusqu’au 14 décembre 2024
Texte et mise en scène Padrig Vion
Avec Louis Battistelli, Lomane de Dietrich
Collaboration artistique Lolita de Villers | Regard extérieur Guillaume Morel | Création lumières Thomas Cany | Création sonore Foucault de Malet
Photographies © Christophe Raynaud de Lage

PRODUCTION Prémisses – Office de production artistique et solidaire pour la jeune création
COPRODUCTION Théâtre Ouvert – Centre National des Dramaturgies Contemporaines
SOUTIEN Maison Maria Casarès, CNSAD
Avec la participation artistique du Jeune Théâtre National
REMERCIEMENTS David Clavel, Pierre Koestel, Claire Lasne-Darcueil, Grégory Gabriel, Grégoire Leprince-Ringuet, Barbara Métais-Chastanier, Anne Leprince-Ringuet, Sébastien de Jésus, Philippe Chamaux (Cie les Aventurier.e.s), l’espace Cromot, Alix Gavoille, India Lange

Tout va bien : comédie sur la fin du monde (ovni clownesque)

La cabane – deuxième salle du Théâtre Silvia Monfort – abrite en ce moment un ovni clownesque, spectacle hybride qui s’ouvre en stand up sous acide (ou prozac ?), dérive en performance chorégraphique electro arty (impeccable création d’ella sombre, très sensorielle), fait un 180° vers du clown à l’ancienne – avec mimes – mais oui, le mime du mur invisible ! on aurait dit le Mime Marceau lui-même -, grimaces, chaussures – eh bien, de clown et costumes bigarrés -, flirte avec le fantastique, et télescope jeux de mots lacaniens, conférence gesticulée et méta-théâtre.

« – Je suis le capital sympathie.
– Et je suis le capital énergie.
Tout va bien

Nadège et Julien, les deux avatars scéniques de Nadège Cathelineau et Julien Frégé, se connaissent bien. Pour ceux qui ont manqué les premiers épisodes, une séance de rattrapage enlevée nous les resitue. Ça fait quelques paires d’années qu’ils se fréquentent. Après avoir dézingué le couple hétéronormé dans Inconsolable(s) puis plongé dans les méandres de leur rapport à la violence avec Chien.ne, ils entament une incursion sur les terres arides de la crise écologique. Dans une démarche de cohérence, ce nouveau spectacle nous est d’ailleurs annoncé comme « éco-responsable, constitué de matériaux et idées 100% recyclées et recyclables ».

« – Tu as des symptômes de findumondose ?
– Oui : j’imagine le pire.
– Le pire, c’est horrible.
Tout va bien

Dans une efficace scénographie minimaliste, dont les lumières et les costumes font décor, avec un sens assumé du comique de répétition, pas peur du mauvais goût, et un jeu très physique, Nadège Cathelineau et Julien Frégé se collettent à la question de la crise écologique dans ses dimensions tant intimes que politiques. Ils interrogent rapport aux origines et besoin de transmission, décortiquent leur empreinte carbone passée présente et à venir, soupèsent les efforts qu’on est prêt à fournir à l’aune de l’urgence climatique… Ce n’est pas parce qu’on a des bottes en caoutchouc et des collants de fitness (très) chamarrés qu’on ne peut pas se poser des questions existentielles.

« – Si je dois changer, qu’est-ce qu’il restera de moi quand je serais autre ?
Tout va bien

Dans une construction en spirale, où chaque partie, de plus en plus déjantée, annule/reprend/ absorbe/sursumme/régurgite la précédente en un jeu de miroirs déformants, le duo farfelu et fou, entre nihilisme et candeur, se lance à corps perdus dans une tentative d’épuisement de toutes nos dérisoires tentatives de colmatage de la brèche par laquelle notre monde et notre « faire-société » se barrent en vrille. Les toilettes sont sèches, les légumineuses en vrac, les yourtes nature, la communication non violente.
Est-ce que cela suffira à sauver l’Humanité ? pas sûr. Ou pourquoi pas ? En tout cas, ce qui sauvera l’humanité de la findumondose, ce sera bien de résister à l’immobilismose !

Le spectacle est « éco-responsable, constitué de matériaux et idées 100% recyclées et recyclables ». C’est une boutade, mais c’est aussi une véritable et louable démarche : le Groupe Chiendent met en place une réelle économie écologique dans la conception et la production de leur spectacle, privilégie récup’ et voyages en train, s’empare de la sobriété pour en transformer la contrainte en une vivifiante utopie, « source de créativité, d’humour et de joie (et c’est vrai) », disent-ils !
Faites du bien à la planète et à votre bonne humeur : Allez vérifier le résultat : Tout va bien, un spectacle garanti éco-responsable, et 100% « source d’humour et de joie » !

Marie-Hélène Guérin

 

TOUT VA BIEN
Un spectacle du Groupe Chiendent
À voir à partir de 15 ans
Au Théâtre Silvia Monfort jusqu’au 7 décembre
Conception, écriture, mise en scène et jeu Nadège Cathelineau et Julien Frégé
Dramaturgie Sephora Haymann | Scénographie, costumes Elizabeth Saint-Jalmes | Création lumière Cyril Leclerc | Création son ella sombre
Crédit photo © Christophe Raynaud de Lage

Ils en parlent très bien ici

Régie générale et lumière Marie Roussel
Administration, production, diffusion Les Indépendances – Manon Cardineau, Colin Pitrat

Diffusion en collaboration avec Le Bureau des Paroles – Emilie Audren
Presse Elektronlibre – Olivier Saksik, Sophie Alavi et Mathilde Desrousseaux
Création au CDN de Normandie-Rouen
Production Groupe Chiendent
Coproduction CDN de Normandie-Rouen, Le Préau-CDN de Normandie-Vire, Le Tangram – Scène nationale d’Évreux, Théâtre L’Eclat Pont-Audemer
Résidences Dieppe Scène Nationale, Le Préau – CDN de Normandie-Vire, L’Aire-Libre Rennes, CDN de Normandie-Rouen, Théâtre L’Eclat Pont-Audemer, Théâtre 13 Paris, Le Tangram – Scène nationale d’Évreux, La Mégisserie Saint-Junien
Avec le soutien de la DRAC Normandie au titre de l’aide exceptionnelle dans le cadre du projet réserve transition écologique, du Département de la Seine-Maritime, de l’ODIA Normandie et de la Ville de Paris au titre de l’aide à la diffusion.
Une maquette a été présentée dans le cadre du festival FRAGMENTS #11 – (La Loge), avec le soutien de l’ODIA Normandie.
Le texte de la pièce est publié aux éditions esse que.
Nadège Cathelineau et Julien Frégé sont artistes associé.es au Centre Dramatique National de Normandie-Rouen. La compagnie Groupe Chiendent est conventionnée par la DRAC Normandie, la Région Normandie et la Ville de Rouen.

Wasted : portrait d’une jeunesse en feu (et en cendres). Un texte vibrant de Kae Tempest porté par une jeune et belle troupe.

(update)
L’historique petite salle du Nouveau Théâtre de l’Atalante (NTA) a changé de direction il y a deux ans. La DRAC a offert sa confiance à une nouvelle équipe, sous la houlette de Bruno Bouzaguet, pour en faire une plateforme de connexion entre la jeune création et le réseau professionnel, un lieu dédié à l’émergence. Y vibre du théâtre à toute heure du jour et du soir – cours, stages, compagnies en « labo », résidences de création, à venir un festival d’écriture contemporaine « Attention, écritures fraîches » où l’on découvrira des textes encore « neufs », jamais montés.

En mars 2023, on y voyait WASTED (Dévasté.e.s) de Kae Tempest, mis en scène par Martin Jobert, diplômé de l’ESCA et artiste associé au NTA pour 3 ans, comme sa consœur Ambre Dubrule. À retrouver dans le cadre du Festival Impatience au Théâtre Louis Aragon, Tremblay-en-France les 14 et 15 décembre 2024

« Il n’y a pas si longtemps, on avait 13 ans, on avait peur de rien. On était jeune, tout était romantique et vrai. Puis quelque chose a changé »
Wasted parle de ce moment particulier de la jeunesse où tout n’est plus possible ; mais où tout est encore à advenir. Une ligne de crête, un point de tension. Ce moment où on se rend compte qu’on est passé à côté de son « ancien futur glorieux ». C’est sûr, on ne sera pas footballeur professionnel, on ne sera pas rock star, c’est sûr, on ne sera pas agent secret. Mais on a à peine plus de 25 ans, on en a encore, de la vie devant soi.

Charlotte, Ted, Dany se retrouvent ce soir-là pour célébrer la mort de leur copain Tony. Ils les a quitté ils étaient ados. Ils le fêteront comme on peut fêter à pas trente ans, dans l’ivresse, les stupéfiants, la musique, la danse, dans les confidences éméchées, les souvenirs flous, les perspectives d’un âge adulte qu’on craint gris, dans les joies et les tristesses folles de l’alcool et de l’amitié.
Ils sont tragiques et poignants, beaux, dérisoires et drôles.
Simon Cohen, Tristan Pellegrino, Kim Verschueren, très joliment accompagnés par les compositions musicales électro et le chant de tête hypnotique de Raphaël Mars, ont l’âge et la fièvre des personnages.
Le jeu est parfois encore un peu frais, ça se comprend, les quatre jeunes gens sortent à peine de l’école, déjà au fil de la représentation ils gagnent en assurance et en liberté, mais ils sont déjà justes et vibrants, ils ont une belle énergie, ils donnent vie à leurs personnages. J’y retrouve ma jeunesse, ma bande de potes, nos craintes, nos rêves, nos indéfectibles liens, notre soif d’absolu, nos failles et nos consolations.

Avec une certaine économie de moyens et des idées gracieuses, soutenu par les décors et les lumières très graphiques de Louis Heiliger et Gauthier Le Goff, Martin Jobert trouve le bon rythme et crée des images discrètement spectaculaires, où des poussières d’étoiles enivrent ses personnages et irisent les spectateurs…
L’abrupte poésie de l’écriture de Kae Tempest, dont on aime la pulsation, la rugosité, dont on aime le désespoir bouillonnant et la fébrilité, dont on aime la ville et les êtres dont iel la peuple, est restituée telle quelle, accent français mais débit fluide et timbre plein, par des apartés en anglais (surtitrés); les dialogues et les relations entre les personnages ont de la vérité et de la chair. Ces jeunes gens, nerveux et doux, pleins de larmes, de fous rires, d’amitié et de désirs, touchent.

Ce n’est qu’un début, on a envie de les voir grandir.

Marie-Hélène Guérin

 


WASTED

De Kae Tempest
Vu Nouveau Théâtre de l’Atalante en mars 2023,
à retrouver en tournée : Théâtre Louis Aragon, Tremblay-en-France les 14 et 15 décembre 2024
Traduction Gabriel Dufay et Oona Spengler – La pièce Fracassés (WASTED) de Kae Tempest est éditée et représentée par l’ARCHE – Editeur & Agence théâtrale
Mise en scène Martin Jobert, assisté de Fabien Chapeira
Avec Simon Cohen, Raphaël Mars, Tristan Pellegrino, Kim Verschueren
Photo Paul Desveaux

Les Deux Déesses, réjouissante comédie musicale écoféministe !

Ça commence par une vieille dame en fauteuil roulant. Une aide-soignante lui pose un casque audio sur les oreilles.
Ça commence par une note, qui enfle, s’enrichit de sons et de résonances. Et va chercher loin dans l’âme de la vieille dame.
Ça commence par le plus vieux souvenir.
Ça commence par un splendide olivier pluriséculaire ; d’ailleurs, il est là au début des débuts : sous ses branches un joli duo – jeunes corps souples, peaux dorés, cheveux bleus, cheveux blonds, dents blanches – s’ennuie. C’est Demeter, sœur d’Hestia, Héra, Hadès, Poséidon et Zeus, qui badine avec le dernier-né Zeus. Comme une sitcom gentiment parodique, solaire et rieuse, avant de tourner vinaigre. Tradition familiale (les parents Cronos et Rhéa sont frère et sœur), et manque d’alternative exogame, Zeus viole-inceste sans états d’âme sa frangine, qui ne prend pas ça avec le même fatalisme que lui (lui : « On est tous frères et soeurs Il n’y a que ça ici des frères des soeurs une mère »). Elle fait son baluchon et se laisse tomber de l’Olympe sur Terre. Bye-bye la famille de tarés, elle débarque sur une petite île desservie uniquement par ferry, juste à temps pour accoucher. La voici, la deuxième déesse du titre, Koré, aînée de l’incommensurable progéniture à venir de Zeus, premier enfant de Demeter, Koré « la jeune fille, la prunelle de mes yeux ». Loin des manigances olympiennes, mère et fille partagent leurs dons agrestes avec la population locale, adoucissent leur propre vie et celles de leurs hôtes, se faisant paysannes boulangères nourricières, veillant à la prospérité du levain et des mangeurs de pain.

Pauline Sales colle au mythe, et s’en décolle tout aussi bien, car la vérité d’un mythe a d’autant moins besoin de précision historique que les interrogations qu’il soulève n’ont pas d’âge. Alors c’est dans une camionnette blanche qu’Hadès vient enlever Koré, sa deux fois nièce, fille de sa sœur et de son frère, et déchirer le cœur de Déméter.

Déméter sur terre en quête de sa fille, Koré aux Enfers en quête de sa vie d’après l’enfance : Pauline Sales nous entraîne à la suite de ces deux femmes qui cherchent une issue, en une presque comédie musicale, souvent facétieuse, parfois grave.
Comédie musicale, mais oui mais oui ! car la comédie est partout, dans le rythme tonique, dans la fantaisie de la mise en scène, dans la drôlerie du texte. Et ce sont les mêmes farces et danses obscènes et grotesques qui avaient tiré sa consœur japonaise Amateratsu hors de sa grotte qui sortent Déméter de sa mélancolie : le rire vainqueur !
Comédie musicale, mais oui mais oui ! car la musique est partout, jouée et chantée sur scène par les interprètes, musicien.ne.s ou non. Mélodies dans la pure tradition du chant français, mi-Fauré, mi-pop, sonorités électro-rock ou évoquant les compositions de Danny Elfman pour Tim Burton, lors d’un délectable tableau aux Enfers… elle fait partie intégrante de la narration, qu’elle accompagne ou déploie. Si les musiciens peuvent se révéler parfois un peu fragiles acteurs, qu’ils passent d’un rôle à l’autre, d’une place à l’autre, faisant corps avec l’action, concourt à la fluidité et à la fraîcheur de ce spectacle toujours en mouvement.

La belle scénographie aussi, dont les changements à vue sont porteurs de sens autant que de plaisirs visuels, participe à ce mouvement qui accompagne celui de la vie des deux déesses, leurs déplacements dans l’espace et dans le temps aussi bien que leurs métamorphoses intérieures. Mouvement qui se traduit jusque dans le changement de prénom de « Koré – la jeune fille » quittant l’enfance en « Perséphone ». Mouvement jusque dans le défilement des jours, puisque c’est des allers-retours de Perséphone entre le royaume des vivants et le royaume des morts, que naîtront le déroulement des saisons. L’espace se dévoile, s’ouvre, se referme, passe de lumière à ombre, de jeunesse à vieillesse, de campagne riante à ville âpre, accueille ou enclôt – décor manipulé par les interprètes sans rupture avec le jeu, tout en légèreté.

Un joli récit d’apprentissage et une tonique fable écoféministe, menés avec vivacité par la « matriarche » Elizabeth Mazev, délectable, entourée à l’unisson d’une troupe enlevée, plutôt homogène, d’une belle énergie. À partager sans restriction avec des adolescents, qui en apprécieront le rythme, la drôlerie, les anachronismes, la contemporanéité de la forme et du propos, les discussions qui pourront en naître. L’ampleur et le sérieux des questions, très actuelles – les liens mère-fille, la violence des hommes sur les femmes, l’émancipation féminine, le « faire-société », la planète Terre blessée, le rapport à la nature, à la mort – sont soulevés à bras le corps par l’intelligence joyeuse et tourbillonnante qui infuse dans toute la pièce. Réjouissant.

Marie-Hélène Guérin

 

LES DEUX DÉESSES,
DÉMÉTER ET PERSÉPHONE, UNE HISTOIRE DE MÈRE ET FILLE
SPECTACLE THÉÂTRAL ET MUSICAL
Un spectacle de la Compagnie À l’Envi
Au Théâtre Gérard Philippe, jusqu’au 1er décembre
Texte et mise en scène Pauline Sales – Les Deux Déesses est publié aux éditions Les Solitaires Intempestifs
Composition musicale Mélissa Acchiardi (batterie, percussion) – Antoine Courvoisier (clavier) – Nicolas Frache (guitare) – Aëla Gourvennec (violoncelle)
et Simon Aeschimann
Avec Mélissa Acchiardi, Clémentine Allain, Antoine Courvoisier, Nicolas Frache, Aëla Gourvennec, Claude Lastère, Élizabeth Mazev, Anthony Poupard
Son Fred Bühl assisté de Jean-François Renet | Scénographie Damien Caille-Perret | Maquillage-coiffure Cécile Kretschmar | Costumes Nathalie Matriciani | Lumière Laurent Schneegans | Travail chorégraphique Aurélie Mouilhade | Régies générale et lumière Xavier Libois | Régie plateau Christophe Lourdais | Régie son Jean-François Renet
Photos © Jean-Louis Fernandez

En résidence au Théâtre Jean Lurçat – Scène nationale d’Aubusson et au Théâtre Cinéma de Choisy-Le-Roi
Soutiens : Fonds SACD/ Ministère de la Culture Grandes Formes Théâtre, Conseil départemental du Val de Marne
Partenaires et coproducteurs : Les Quinconces L’espal – scène nationale du Mans; La Halle aux grains – scène nationale de Blois; Théâtre Jacques Carat, Cachan; L’Estive – scène nationale de Foix et de l’Ariège; la C.R.É.A – Coopérative de Résidence pour les Écritures, les Auteurs et les Autrices, Mont Saint-Michel; Théâtre Gérard Philipe, centre dramatique national de Saint-Denis; Espace Marcel Carné, Saint-Michel-sur-Orge; MC2: Maison de la Culture de Grenoble – scène nationale; Compagnie Atör.
Création les 5 et 6 novembre 2024 aux Quinconces L’espal – Scène nationale du Mans

An Irish Story : humour et cup of tea contre vents et marées !

La petite salle de la Scala abrite dans son cocon un bien joli seule-en-scène.
Une petite estrade, un pouf moumoute, une pile de livres, et en guise de mur de fond une frise de photos de famille : dans un décor tout simple et accueillant, Kelly Ruisseau, pseudonyme modeste de l’autrice/interprète/personnage, nous embarque dans la quête de ses origines.
Dans la légende familiale maternelle plane l’ombre du grand-père, Peter O’Farrel, né dans les années 30 en Irlande du Sud, parti s’installer en Angleterre dans les années 50 et qui disparaît dans les années 70.
Puisque personne n’en disait rien, Kelly ado en faisait un grand-père palimpseste, sur l’absence duquel elle dessinait des existences toujours plus romanesques, et s’en accommodait bien.

Mais on grandit, et les mystères, ça commence à bien faire ! Kelly Ruisseau va devenir mère, et puisqu’elle ajoute une branche à l’arbre généalogique, veut retrouver le chemin vers ses racines, pour se délier du poids du silence.
Pas moyen d’y parvenir en ligne droite et en prise directe puisque sa mère semble avoir posé un tabou inaltérable sur le sujet, alors on va louvoyer, et tel le saumon, remonter la rivière à contre-courant vers l’origine. Kelly la Parisienne embarque son frangin à Londres puisqu’on sait que le grand-père y célébra son mariage après-guerre, que leur mère y naquit (trois mois après le mariage, est-ce bien catholique ?) et qu’y vit toujours la grand-mère. Et si la grand-mère n’est pas plus loquace que la mère, on ira jusqu’en Irlande, s’il le faut (il le faudra) !

L’interprète seule-en-scène incarne avec agilité le ban et l’arrière-ban familial, de Kelly la Parisienne aux grands-tantes restées dans la bourgade d’origine, en passant par l’employée des archives londonienne et le charmeur joueur de fiddle du fin fond du pub irlandais. Bilingue, et comédienne souple et alerte, elle fait remonter la langue anglaise et l’accent irlandais au fil des générations, les « r » roulant délicieusement dans l’anglais de moins en moins britannique plus on se rapproche de la source gaélique de la famille. C’est un vrai feu follet, elle est joueuse, bondissante, se métamorphose en un éclair, chacun de ses personnages prend vie et sens en un changement de posture, de timbre et de lueur dans l’œil.

Le trajet de Peter O’Farrel témoigne de la dureté de la société, et du temps où il vivait – où un pas de travers pouvait mettre au ban de la communauté, où l’Irlandais était pour Sa Majesty la Queen un sujet de moindre valeur qu’on pouvait déplacer au gré des besoins britanniques. Et se fait le porte-parole de tous les exils, de toutes les familles dé-racinées de notre siècle, poussées hors de leur sillon par les nécessités politiques ou économiques. Mais si Kelly Rivière et/ou Ruisseau ne passe pas cet aspect sous silence, on navigue avec beaucoup d’allant et de fraîcheur dans sa généalogie : humour and cups of tea contre vents et marées !

C’est à une quête/enquête pleine de rebondissement et de gaieté qu’elle nous convie, où les tabous de ce côté-ci de la Manche ne sont qu’une « irish story » vus de l’autre côté et où le secret le plus important qui sera révélé ne sera pas celui (attention, divulgâchage !) d’une disparition, mais celui d’un amour.

Cette histoire irlandaise touche et enjoue le public depuis sa création, bonbon acidulé et tendre dont il fait bon se régaler !

Marie-Hélène Guérin

 

AN IRISH STORY
Un spectacle de la Compagnie Innisfree
A la Scala-Paris jusqu’au 23 juin 2025
Texte, mise en scène et jeu Kelly Rivière
Collaboration artistique Jalie Barcilon, David Jungman, Suzanne Marrot, Sarah Siré
Scénographie Grégoire Faucheux et Anne Vaglio | Costume Elizabeth Cerqueira | Collaboration artistique à la lumière Anne Vaglio | Régie Générale Frédéric Evrard en alternance avec Agathe Patonnier | Administration et production Agnès Carré

Photos David Jungman

Production Compagnie Innisfree
Soutiens : SPEDIDAM, Fonds de soutien AFC Avignon Off, Fondation E.C.Art-POMARET, Festival Off Avignon IF, Maison Maria Casarès, Château de Monthelon, Studio Thor de Bruxelles, Samovar à Bagnolet, Théâtre de la Girandole à Montreuil, Groupe Leader Intérim, Théâtre de Belleville

Les tigres sont plus beaux à voir, portrait d’une autrice

Au théâtre de l’Epée de Bois, le sol pavé de bois, les hauts murs de lambris, font déjà décor.

Des tables toutes simples qui cernent l’espace de jeu, dans un coin une petite console aux fins pieds chantournés, beaucoup de verres, des livres, de la musique. De quoi meubler une scène et raconter une vie.

L’énigmatique et beau titre du spectacle Les tigres sont plus beaux à voir fait référence au premier recueil de nouvelles de Jean Rhys traduit (par Pierre Leyris, en 1969) en France. Beau et amer, puisque les tigres sont plus beaux à voir que les hommes.

A l’avant-scène, une comédienne se fait petite fille pour narrer une enfance qu’on imagine heureuse, à La Dominique, dans sa famille de planteurs, dominicains depuis cinq générations du côté de sa mère, fanfaronne-t-elle gentiment. Elle y a des souvenirs de petite fille blanche, née dans une famille coloniale de la fin du XIXe siècle.

« Mrs Hammer » demande un jeune homme à la réception d’un hôtel. C’est le vrai nom de Jean Rhys, « utiliser son nom réel serait la preuve que j’appartiens d’une manière particulière à son monde personnel ». Il a rendez-vous.
David Plante (Jules Churin, sobre et juste) dans les années 70, lui-même romancier en devenir, avait rencontré Jean Rhys, autrice britannique qui tarda à être reconnue, étoile filante qu’on a même crue morte de son vivant, dont il tenait à entendre et faire entendre la voix, le récit. Touché par ses écrits humanistes à la lucidité aiguë, il va l’accompagner dans l’élaboration de son autobiographie. Magali Montoya a tressé des extraits de leur entretien avec des fragments des romans de Jean Rhys, en un tissage si fin que les coutures en sont impalpables, fiction et réel se nourrissant mutuellement.

La voix de Jean est répartie entre les trois comédiennes, et ce mouvement de diffraction en dresse un portrait comme cubiste, fragmentaire, multipliant les angles de vue, les points de départ, bousculant les lieux et les périodes. La Dominique, Paris, Londres, enfance, jeunesse, vieillesse, temps de solitude, temps d’écriture, les mariages, l’enivrement de la création, l’enivrement de l’alcool, les temps de disette et les temps de renom… – de même cela se mêle dans la mémoire de l’autrice…

La petite fille est désormais une vieille dame un peu indigne, qui aime boire des gins-vermouth et a des emportements d’adolescente. Avec elle qui aura été attaché aux marginaux et aux laissé.e.s-pour-compte de la société, on parcourt un demi-siècle de création littéraire et de bohème âpre.


 
La mise en scène écrit dans l’espace des déplacements à la géométrie un rien désuète, en une chorégraphie légère qui met en avant une facette ou l’autre de Jean Rhys, fait et défait les duos, laisse joliment la place à la musique (guitares, chant, clavier) interprétée sur scène par Roberto Basarte, qui apporte un charme supplémentaire. Nathalie Kousnetzoff, Bénédicte Le Lamer, Magali Montoya, costumes soyeux aux teintes sourdes – les trois Jean Rhys, Jules Churin, en tee-shirt blanc et veste de ville – le jeune écrivain, ont un jeu limpide, tout en retenu, parfois facétieux, et se glissent aussi subtilement dans la peau d’autres protagonistes, fictifs ou réels.
Les tables sont déplacées par les interprètes en une valse fluide, s’écartant et se regroupant, laissant de la circulation autour ou entre elles, en dessus, en dessous, se faisant banquettes, cachettes, bureaux, estrades… un espace mouvant comme celui qu’abrite la mémoire d’une vie.

« La littérature est un lac, écrivit Jean Rhys.
Il y a de grands fleuves qui l’alimentent, comme Dostoïevksi, Tolstoï, et de menus filets d’eaux comme Jean Rhys. L’important est de continuer à alimenter le lac. Mais il faut y puiser aussi, y plonger les mains… »

Un spectacle méditatif, élégant, tout en délicatesse et en demi-teintes, hommage à une femme qui plongea dans l’écriture avec « comme une démangeaison dans les doigts, une nécessité de déverser son histoire », qui confia « je crois que je préfèrerai être heureuse qu’écrire » – et qui eut le bonheur de ne cesser d’écrire.

Marie-Hélène Guérin

 

LES TIGRES SONT PLUS BEAUX À VOIR
Un spectacle de la compagnie Le Solstice d’Hiver
Au Théâtre de l’Epée de Bois jusqu’au 26 novembre 2024
d’après la vie et l’œuvre de Jean Rhys
Adaptation et mise en scène Magali Montoya
Traducteurs Jacques Tournier, Renée Daillie, Claire Fargeot et Christine Jordis
Avec Nathalie Kousnetzoff, Bénédicte Le Lamer, Jules Churin, Magali Montoya
Musique originale sur scène Roberto Basarte
Scénographie Marguerite Bordat, Caroline Ginet | Costumes Virginie Gervaise | Lumière Jean-Yves Courcoux | Régie générale Johan Olivier
Photos © Bellamy

En savoir plus : notes d’intention, listes des œuvres citées, biographie de Jean Rhys : clic ici

La compagnie Le Solstice d’Hiver est conventionné depuis 2018 et soutenu par la DRAC Île-de-France. Co-production, accueil en résidence, Théâtre Molière, Sète scène nationale archipel de Thau. Soutiens, accueils en résidences : Le Moulin du Roc, scène nationale de Niort, La Rousse Niort Théâtre Le Colombier, Bagnolet, Théâtre de Magnanville, Le Colombier Avec l’aide de la SPEDIDAM, l’ADAMI et la Jean Rhys Ltd.

Je suis trop vert : la classe !

Avec un gros parallélépipède plein de trappes et de caches, trois fantastiques comédiennes, une justesse d’observation ravageuse et une vivacité d’écriture de chaque instant, David Lescot, dont on avait beaucoup aimé la Revue rouge en 2017, concocte un régal de spectacle « jeunesse ».

Je suis trop vert fait suite à J’ai trop peur et J’ai trop d’amis, que le Théâtre de la Ville a la bonne idée de reprendre pour ceux qui veulent faire plus ample connaissance avec le jeune héros, « moi », 10 ans et des poussières. Dans J’ai trop peur, il affrontait le grand passage de l’école élémentaire au collège (et « la première année au collège, c’est tout simplement horrible ! Tout le monde le sait ! »), puis découvrait dans J’ai trop d’amis la complexité des relations sociales.
On est en novembre, « moi », le jeune héros de la trilogie, se sent bien dans sa classe. Grande nouvelle pour lui et ses camarades : la 6e D va partir en classe verte, après les vacances de Noël, au cœur de la Bretagne. Des semaines à ne penser plus qu’à ça !
 

Des cailloux se mettent dans le soulier du projet, qui démarre un peu boiteux : sur les vingt-neuf familles de la 6e D, trois ne souscrivent pas, et, déception-frustration-j’suis trop vert ! il ne faut pas plus de deux désaffections sinon, annulation ! Merci l’amitié et la solidarité, obstacles pécuniaires ou hypocondriaques sont balayés et les mômes se retrouvent enfin dans le car scolaire pour LA CLASSE VERTE !

Le jeu des chaises musicales pour les places dans le car, la sensation du réveil un peu vaseux après une nuit de route, la symphonie des bruits de la ferme – tracteur, broyeur à grain, chiens, coups de marteau, vaches, poules… – bruités en direct, pour le plus grand plaisir de l’auditoire -, les cours en pyjama, les matériaux réels manipulés par les comédiennes – feuilles mortes, terre, grains de maïs… : on s’y voit, on y est !
Dans le texte comme dans la mise en scène, le spectacle fourmille de ces mille détails « bien vus » qui titillent l’imagination des petits ou les souvenirs des grands.
 

La classe est accueillie par les deux ados de la ferme, Cameron et Valérie. L’occasion pour les élèves et les petits spectateurs citadins de découvrir à quoi ressemble une journée de travail à la ferme, aérer la terre, préparer l’engrais, nourrir les animaux, finir la journée bien crotté et bien crevé !, manger les légumes qu’on récolte, – voir d’un peu plus près le lien entre la nature et les humain.e.s qui l’utilisent et en dépendent.

Avec Valérie, 13 ans, qui prône d’un air bourru une agroécologie douce et respectueuse, « moi » met les mains dans la terre, et la tête dans un autre monde, fait d’autres rythmes, d’autres façons de vivre, d’autres légendes.
 

« Les parents t’ont appris plein de trucs, mais ça, ça va être toi qui va leur apprendre »
dit « moi », à sa petite sœur, militante écolo de 3 ans

David Lescot a eu l’idée très futée de faire porter le message de l’éco-responsabilité contemporaine à la petite sœur du narrateur. Mini-activiste radicale de 3 ans, restée à la maison avec papa-maman, elle jette ses jouets en plastique, éteint les lumières et, toute zozotante et zézayante, elle somme la famille de remplacer le chauffage par des paires de chaussettes et des pulls pour sauver les pitits pinguins et les zou’s blancs. Manière de faire un peu de pédagogie avec beaucoup d’humour !

La petite sœur ce jour-là était interprétée par Lyn Thibault, qui jouait aussi d’autres personnages. Sur scène avec elle Camille Bernon portait aussi plusieurs rôles, tandis que Sarah Brannens restait « moi ». Mais ça aurait pu être l’une ou l’autre ou leurs acolytes Elise Marie, Lia Khizioua-Ibanez et Marion Verstraeten : comme dans les volets précédents, elles échangent leurs rôles au gré des représentations. Il y a fort à parier que toutes les combinaisons soient également réjouissantes ! Elles ont toutes beaucoup de précision dans le dessin des différents protagonistes qu’elles interprètent, et une belle énergie, fraîche, enjouée et communicative.

« Nous on sent qu’on a changé, mais les autres ont pas bougé,
alors y a un décalage »
« moi »

À voir avec des enfants dès 7-8 ans : la mise en scène astucieuse, le décor à malice, les dialogues vifs et imagés, le jeu punchy des interprètes les embarqueront allègrement dans ce voyage initiatique. Un spectacle tonifiant, plein de vie et de gourmandise, qui aborde joyeusement et sans naïveté aussi bien l’esprit de groupe que les moments qui font grandir ou les questions liées à l’environnement, pour des gamins des villes et des champs d’aujourd’hui.
 

Marie-Hélène Guérin

 


 
JE SUIS TROP VERT
Au Théâtre de la Ville jusqu’au 16 novembre 2024
Texte et mise en scène David Lescot
Scénographie François Gauthier-Lafaye | Lumières Juliette Besançon | Costumes Mariane Delayre
Assistante à la mise en scène Mona Taïbi
Avec en alternance Lyn Thibault, Élise Marie, Sarah Brannens, Lia Khizioua-Ibanez, Marion Verstraeten, Camille Bernon
Photos © Christophe Raynaud de Lage

À VOIR EN TOURNÉE
 du 2 au 17 novembre au Théâtre de la Ville – Paris / les 9-10 et 16 novembre : L’Intégrale
 19 et 20 novembre au Théâtre+Cinéma – Scène nationale de Narbonne
 21 novembre à Narbonne / programmation du Crédit Agricole
 22 novembre à Lattes / programmation du Crédit Agricole
 26 novembre à Nîmes / programmation du Crédit Agricole
 28 novembre à Mende / programmation du Crédit Agricole
 du 9 au 18 décembre au TNG – Centre Dramatique de Lyon
 du 13 au 15 janvier au Théâtre de l’Olivier – Istres / Scènes et cinés
 du 30 janvier au 1er février au Théâtre des Sablons – Neuilly
 les 27 et 28 février à la MCL – Gauchy
 les 12 et 13 mars au Théâtre André Malraux – Reuil-Malmaison
 du 13 au 16 avril à Les Petits devant, les grands derrière – Poitiers
 les 28 et 29 avril au Théâtre du Champ du Roy – Guingamp

Production Compagnie du Kaïros. Coproduction Théâtre de la Ville-Paris.
La Compagnie du Kaïros est soutenue par le ministèrede la Culture – DRAC Île-de-France.
Le texte de la pièce est édité aux Solitaires Intempestifs, collection jeunesse,
avec les illustrations d’Anne Simon. Parution : octobre 2024

© Anne Simon

Gourou : tel est pris qui croyait prendre

« Mathias apprend qu’il est l’unique héritier d’une mystérieuse secte américaine,
l’Église Véritaniste. 100 millions de dollars l’attendent, à une condition : faire renaître la secte de ses cendres et réunir au moins 5000 fidèles en moins de 6 mois. Il doit devenir Gourou…»

© Yume Nanbu

Au Petit Gymnase, GOUROU, une joyeuse comédie portée par une énergique et talentueuse troupe de jeunes comédiens, au service d’un sujet moins en vue dernièrement mais toujours d’actualité, l’endoctrinement sectaire.
Mathias, loser indolent (parfait Loïck Müllauer), s’embarque dans une spirale infernale d’emprise… Tel est pris qui croyait prendre, une fois que la machine est lancée, gourou et fidèles sont prisonniers du même cercle vicieux.
Gourou dénonce les rouages de la manipulation mentale, et les travers de notre société prompte à préférer les vérités alternatives plutôt la banale réalité. Le sujet est grave mais traité avec vivacité par l’absurde. Entre boutade et pamphlet, le texte distille avec à-propos quelques pointes de noirceur dans une comédie qui reste tout de même assez convenue, et qu’on aurait aimé voir aller plus loin dans sa folie. Mais la mise en scène maline, rythmée, un peu cartoon et parfois bien allumée lui donne du relief et offre aussi quelques belles images. Le décor graphique, tout simple, fait de cubes et quelques accessoires, et un travail de lumières bien pensé permettent de moduler l’espace de manière efficace. Soulignons le jeu généreux, sincère et maîtrisé des interprètes, jeunes gens très prometteurs !

GOUROU
Au Théâtre du Gymnase
Avec François Aubagnac, Suzanne Gardeux, Dorian Fontyn, Thomas Milatos, Mélodie Møller, Loïck Müllauer
texte de François Aubagnac, mise en scène Suzanne Gardeux, collaboration artistique Laurence Cote
Photo d’en-tête : © Philippe Gardeux