Claire, Anton et eux : portrait de groupe

– Je m’appelle Léa Tissier, c’est l’anagramme de Laeticia
– Non
– Presque. Ça veut dire « joie »

 
Un plateau nu, sagement encadré à cour et à jardin de chaises, bordé en fond de plateau d’un portant chargé de costumes. Un piano discret attend son tour.

Claire, Anton et eux : Claire, c’est Claire Lasne-Darcueil, directrice du CNSAD. Anton, c’est Tchekov, auteur fétiche, figure tutélaire, et eux… « Eux », ce sont la la promotion 2015-2017 du Conservatoire.
Elle a invité François Cervantes a écrire et mettre en scène un spectacle pour ce « eux », apprentis comédiens en fin de cursus, en début de l’aventure du métier d’acteur. Ils sont une quinzaine, ont entre 22 et 30 ans à peine. Silhouettes longues ou rondes, peaux claires ou sombres, démarches solides ou toutes de fêlures, pieds nus ou chaussés, ils s’avancent sur le plateau, le regard net, droit planté dans les yeux des spectateurs.

Lorsque François Cervantes les a rencontrés, il a été séduit par « la beauté et la diversité de leurs visages » :
« Je me suis mis à penser qu’à travers ces corps, dans la chair, dans l’exécution d’un geste, se rencontraient tous les ancêtres de ces jeunes gens. Je me demandais par quels chemins étaient passé les désirs de plusieurs générations pour aboutir à (leur) présence » . Alors plutôt que de leur bâtir une fiction, il est parti d’eux et leur a construit une histoire de leurs histoires.
 

« Je devais être judoka, j’ai choisi théâtre.
– Qu’est-ce qui te manquait dans le judo ?
– La langue. »

 
Claire, Anton et eux - François Cervantes /CNSAD - © Christophe Raynaud de Lage
 
Chaque comédien sera lui – ce « lui » né du croisement de sa vie et de l’invention du plateau, et sera aussi ses ascendants, son futur; parfois aussi il croisera les vies de ses camarades, devenant un instant la mère, le grand-père d’un autre pour un bref dialogue.
La mise en scène ne dissimule pas son sujet, on y retrouve de ce qui fait le travail d’atelier des comédiens, exercices de chœur, d’écoute, déambulations, narrations, saynètes…
La gestuelle est millimétrée, chorégraphiée, ne cherche pas le réalisme : ce n’est pas dans le réalisme que se love la vérité, mais dans la justesse et la sincérité des comédiens, dans la pudeur et l’abandon des confidences, dans la poésie d’une mise en scène qui trouve les bonnes distances – les espaces vides et les rapprochements des corps où naissent tensions, rythmes, émotions.
 

« J’ai 4 ans et je suis à la commedia’dell’arte.
Pantalone crie « Personne ne m’aime ! », je lui crie « Moi je t’aime ! ».
Il descend de scène, il me sert dans ses bras. Je me dis que plus tard je ferai du théâtre. »

 
Les époques et les langues s’enchevêtrent.
Les milieux, les cultures, les continents.
Sipan, aux parents arméniens de Syrie;
Louise qui à 3 ans et demi hurlait pour retenir sa mère qui partait jouer tous les soirs au théâtre;
Solal qui avait sans doute un ancêtre rabbin, au XIVe siècle;
Théo dont le grand-père Fernand sait à peine lire « mais j’ai toujours tout fait pour que mes enfants étudient »;
La souriante Salomé-Shalom, Sélim le fils du footballeur de Meknès, Lucie, Mélina, Gabriel et les autres… on entend parler arménien, espagnol, on entend des airs en russe, en allemand, en yiddish, on entend Björk : on est de partout, et d’aujourd’hui.

Ils sont multiples, divers, ces jeunes gens; les voix de leurs ancêtres ont autant d’accents différents; et pourtant, et d’autant plus, quelque chose les a amenés à être ensemble, à faire corps. François Cervantes nous donne à voir cette magie qui fait d’êtres disparates une troupe, pleine, vivante.
 

« J’aimerais bien lire, nous confie la grand-mère à Tunis en 1951. J’ai jamais vraiment réussi à lire. Mais j’aime bien regarder les livres. Les gens qui lisent. »

 
Claire, Anton et eux - François Cervantes /CNSAD - © Christophe Raynaud de Lage
 

On est ému de choses minuscules, souvenirs si précis, si intimes, si personnels qu’ils sont aussi ceux de tout le monde; on rit beaucoup aussi : aucune pesanteur dans la gravité, beaucoup de malice, un esprit allègre.

Le spectacle est parcouru de musiques, d’esquisses de danses pinabauschesques, de courses effrénées. C’est une jeunesse en mouvement, bondissante, véloce, tendre. Qui êtes-vous, en quoi avez-vous cru, où est né le théâtre en vous ? On sent parfois chez ces tout jeunes comédiens l’émotion affleurer. Ils savent déjà s’en nourrir et la contenir. Tous sont généreux, sensibles, précis. Ils ont du charme, du talent, des choses à dire.

Les menus fragments qui composent cette fresque en mosaïque dessinent des humanités vibrantes, traversées de fous-rires, de morts, de jeux, de bêtises, de rêves… et de joie, pour aujourd’hui et pour demain. Un spectacle humaniste et lumineux. On a envie de les retrouver, bientôt, pour longtemps.
 

« On est déjà immortel. Et pour toujours. »

 

– Marie-Hélène Guérin –

 

CLAIRE, ANTON ET EUX

Texte et mise en scène : François Cervantes
Avec Gabriel Acremant, Théo Chédeville, Salif Cissé, Milena Csergo, Salomé Dienis-Meulien, Roman Jean-Elie, Jean Joudé, Pia Lagrange, Sipan Mouradian, Solal Perret-Forte, Maroussia Pourpoint, Isis Ravel, Léa Tissier et Sélim Zahrani
En tournée : dates sur le site de la Compagnie L’Entreprise
Photos © Christophe Raynaud de Lage

« Cendres », se brûler les ailes

Sur le tulle, des ombres de sous-bois se métamorphosent en lettres pour devenir les mots poétiques de Pär Lagerkvist

« Presque tout est de si peu d’importance. Mais quand surgit au ciel, comme un nuage incandescent, l’ineffable, tout est consumé.Tout est transformé, toi aussi tu es transformé, et ce qui il y a peu te semblait de la plus grande valeur n’est plus rien.
Tu t’éloignes parmi les cendres de tout devenant cendres toi-même.
 » Pär Lagerkvist

 

Les nappes de sons électroniques font vibrer l’espace.
Des maisonnettes blanches, à peine plus grandes qu’un jeu d’enfant, suspendues en l’air, s’éclairent.
Une marionnette haute comme un une poignée de pommes s’avance, un rouquin en jean, mal rasé, jerrican rouge sous le bras.

A l’avant-scène, c’est la place de l’auteur, un petit bureau tout simple, des bouteilles vides, une pomme entamée. Ordinateur portable, feuilles en vrac. Il marmonne, boit de la bière, cherche l’inspiration, boit de la bière, grogne. Le récit de Dag le pyromane peine à naître sous ses doigts. Pourtant, Dag le pyromane, c’est son jumeau de méfaits, ils sont du même village, il a allumé son premier incendie le jour de la naissance de l’auteur, ils sont liés, l’auteur le sait, il veut enfanter de cette histoire, il veut raviver ses feux, peut-être comprendre, au moins saisir.
Cendres, un spectacle de la compagnie Plexus Polaire
Et pendant que l’auteur se ronge, Dag le pyromane prend vie. Les acteurs-manipulateurs donnent à ses courses folles des airs de danse fiévreuse. Dag le pyromane aime l’odeur de l’essence et la beauté des flammes.
Dag le pyromane s’abîme dans la contemplation des maison en feu, l’auteur s’abîme dans l’alcool. Frères d’abysses et de ténébres.
Leurs monstres sont terribles et beaux, et les dévorent. Un grand chien nébuleux se bat dans un cerveau noyé de brumes.

L’homme est poignant d’avoir le corps solide et l’âme désarmée. Les marionnettes sont si souples, ont le visage si expressif, les yeux si brillants qu’on doit se forcer à admettre que l’on n’a pas vu voir leurs traits bouger.
On sort sidéré de ce rêve ou ce cauchemar, de ce récit ou ce souvenir, on s’ébroue, on emportera avec soi des fumerolles de cet incendie.

Marie-Hélène Guérin

 

Cendres, un spectacle de la compagnie Plexus Polaire

CENDRES
Inspiré du roman « Avant que je me consume » de Gaute Heivoll
Mise en Scène : Yngvild Aspeli
Collaboration Artistique : Paola Rizza
Acteurs-marionnettistes : Viktor Lukawski, Aitor Sanz Juanes/Alice Chéné, Andreu Martinez Costa
Avignon Off 2018 : à La Manufacture à 18h05 jusqu’au 26 juillet

La Scierie, extra-muros

Ça a commencé par une envie. Un tract parmi des centaines d’autres : Burning Speech à La Scierie.

On franchit les remparts et déjà, on transgresse.

Du théâtre qui se mélange ! Qui se mélange avec des slogans, des discours, de la musique. Un karaoke de grands discours politiques, des affiches, des inventions, des rencontres, de la danse. Une soirée unique organisée par la compagnie L’individu en partenariat avec la Scierie. Toute une journée au parcours riche, éclectique et foisonnant. Au cœur de cet événement, une proposition de l’acteur Selman Reda accompagné musicalement par Yann Synaeghel autour du texte Discours à la nationd’Ascanio Celestini. De la parole qui danse, qui crie, qui crève les cœurs, et les entraîne.

Vous connaissez la Scierie ? Une scierie. Avant. Un nouveau lieu. De théâtre. Du In et du Off. Oui, vous avez bien lu. Du In et du Off. Il y a aussi un gigot volant : c’est le nom de la guinguette-bar-bio qui sévit alentour.  On y sert des œufs d’autruche avec mouillettes géantes, on peut y jouer au ping pong. (Tout ce que je dis est vrai.)

Un lieu de vie. Un lieu à part, où le théâtre sait s’entourer d’espace, de danse, de musique, de liberté. On y fait de belles rencontres.

Burning speech La scierie Avignon

Burning Speech – Parole brûlante

 

J’y étais de nouveau, quelques jours plus tard.

De nouveau un tract. De nouveau une envie, un espoir, l’espoir d’une découverte.

Ce spectacle ne se décrit pas. C’est un moment à vivre. Une expérience.

Si je parle de rêve, vous vous méprendrez. On est dans l’écart, l’à côté, une zone trouble.

Ce spectacle est fait de fragments, d’un regard qui fuit ou qui se pose, de distances et de proximité, de chaud et de froid, d’hésitations et de décisions. De doutes qui s’explorent, se caressent et s’apprivoisent, se tordent et se crachent. D’une intelligence nourrie d’émotions qui se contruit et se cherche, qui cherche et construit. Un regard renouvellé sur le temps et l’espace, sur notre monde, notre étrange quête d’humain.

On traverse des histoires, des impressions, des sensations. On suit un parcours physique, en lien permanent avec le comédien.

Un spectacle étrange et intense, sans aucune complaisance, ni démagogie. Sa force est brute et — c’est une évidence — on ne peut plus sincère. On est ici et maitenant. Et en même temps n’importe où hors du monde.

Dans ces hésitations, ces heurts, une violence éperdue, douloureuse, belle ou grotesque. Les deux.

À cette errance construite et musclée, on participe. Chacun.  Jeden.

Le souvenir de ce spectacle perdurera en moi, je le sais. Il creuse loin en l’homme. En nous.

-Agnès T.-

JEDEN

JEDEN
Texte, mise en scène et jeu : Marcelino Martin-Valente
Avignon 2018 : 6 au 29 juillet (La Réserve) 16h05

DE DINGEN DIE VOORBIJGAAN (Les choses qui passent)

Le temps fuit.
La vie, la mort.
Les vies et les morts.
Traversées par des fulgurances de désir, des désirs qui dévorent, des secrets qui brûlent.
Lait noir, cheveux de cendre, braises englouties au cœur des corps, coins peuplés de fantômes,
Des frères et des sœurs, des enfants et des petits enfants, des parents, tout un enchevrêtrement généalogique de corps désirants, de besoins d’amours. Hommes et femmes sont là, écrasées par le ciel sombre, haletant leur tendre et déchirant désespoir. Des êtres plaqués au sol, délicats oiseaux à l’inconcevable envol.

De Dingen die Voorbijgan

 © Christophe Raynaud de Lage

Le désir palpite au creux des corps, impossible paradis. La chair triste hélas, mais brûlante, foyer des âmes et des élans, brûle et s’effrite, s’émiette.
La langue résonne et dit. Les noires silhouettes traversent l’espace. L’univers bascule sur lui-même, les lignes se brouillent les dimensions tanguent, la neige est noire, le miroir devient écran. Que raconte-t-il de nous ?
C’est aussi bien le désir des femmes que celui des hommes qui bouleverse le monde, le renverse.
Mais la grande roue de la vie est figée dans son enchevêtrement de métal, muette et glacée.
Petite et grande mort. La grand-mère centenaire meurt dans un râle qui sonne autant comme un cri de délivrance que de jouissance.

De Dingen die Voorbijgan

Les choses qui passent sont passées.
Et quand le spectacle se clôt sur un plateau noyé sous une neige de cendre, englouti dans les coulées de brouillard rampant, la corne de brume n’est plus que le souvenir d’un souffle, et l’on ne saura pas si c’était une chauve-souris ou un oiseau qui a traversé le ciel de la Cour du Lycée St Joseph.
Les oiseaux sont ivres.
Il est minuit.

Agnès T.

DE DINGEN DIE VOORBIJGAAN (LES CHOSES QUI PASSENT)
D’après Louis Couperus
Mise en scène : Ivo van Hove
Avec : Katelijne Damen, Fred Goessens, Janni Goslinga, Aus Greidanus jr., Abke Haring, Robert de Hoog, Hugo Koolschijn, Maria Kraakman, Majd Mardo, Celia Nufaar, Frieda Pittoors, Luca Savazzi, Gijs Scholten van Aschat, Bart Slegers, Eelco Smit
Avignon In 2018 : Cour du Lycée Saint-Joseph du 14 au 21 juillet à 22h

Les Monstrueuses, récit d’une libération

On est au début du XXIe siècle. Ella perd connaissance devant un laboratoire d’analyse lorsqu’elle apprend qu’elle est enceinte. Elle se réveille dans une chambre d’hôpital… le corps resté dans le présent, la tête partie dans le passé, en 1929.
« Mes règles ont 10 jours de retard, je sais ce que ça veut dire, des règles qui ne viennent pas en 2008. Il ne faut pas être bien intelligente pour comprendre ce que 10 jours de retard, la France, l’amour, en 2008… Il faut avoir un peu de sottise en soi, et assez de soleil pour le crier dans la rue à tue-tête ! »
La nouvelle tant attendue… quelque chose claque en Ella, un ressort se tend tellement – perte de connaissance. Choc traumatique, amnésie passagère, confusion mentale. Ou plutôt, choc affectif, réveil des secrets, surgissement de la mémoire familiale. Quelque chose a besoin de la traverser, des vies ont besoin de prendre corps pour qu’elle puisse donner la vie.
Un spectacle coécrit et interprété par Leïla Anis et Karim Hammiche, photo Karim Hammiche Photo © Karim Hammiche

« Le monstre, c’est le silence. »

 

C’est un conte, une étrange mélopée nocturne qui entame le récit, une litanie qui a quelque chose de sauvage, où rode la femme folle, où seule la lune luit.
Au fil de son amnésie, Ella fait revivre des souvenirs cachés, des souvenirs qui ne sont pas les siens mais sont devenus les siens par la force des secrets reportés de génération en génération. Du début du XXe au début du XXIe, du Yémen à la France, Ella fait la grande traversée de l’espace et du temps pour se dévoiler la lignée des femmes qui mène à elle, à elle et à l’enfant à naître. L’arrière-grand-mère Jeanne l’affranchie, celle qui grâce à son père « savait aussi bien lire et compter que ses frères », la grand-mère Rosa qui a dû grandir sans sa mère, Joséphine la maman étouffante, Awa l’arrière-grand-mère yéménite qui savait les imprécations magiques, la grand-mère Zeïna qu’on a marié à Mounir pour faire la paix avec le clan de Mounir… Toutes : femmes à qui ont a appris le silence. A taire la frustration et l’ennui, à cacher la douleur, à mentir pour que la honte reste au creux de leurs ventres, à souffrir la tête haute. Ella va leur redonner la parole.

Leïla Anis donne vie à toutes ces femmes avec beaucoup de finesse, une présence vive et gracieuse. En contrepoint, le rôle du médecin qui prend en charge Ella est tenu par Karim Hammiche, co-auteur, qui signe aussi la mise en scène, avec une retenue et une bienveillance parfaites. L’espace est rythmé d’une création lumière minimale et élégante. La mise en scène est millimétrée et discrète. C’est avec une grande délicatesse et une humanité tangible que Leïla Anis et Karim Hammiche dessinent la violence, l’oppression subie, la dévoration des femmes par « le monstre » – et leur libération par l’amour et la parole de la toute dernière, celle qui va continuer la lignée, allégée du poids du secret, vivifiée de la force ancienne de toutes ces femmes qui l’ont précédée.

Marie-Hélène Guérin

 

Un spectacle coécrit et interprété par Leïla Anis et Karim Hammiche, photo Xavier Cantat Photo © Xavier Cantat

LES MONSTRUEUSES
Un spectacle coécrit et interprété par Leïla Anis et Karim Hammiche
et mis en scène par Karim Hammiche
Avec Leïla Anis, Karim Hammiche
Avignon Off 2018 : au 11 Gilgamesh jusqu’au 27 juillet à 11h25

PLAYLOUD de Falk Richter

Le PLAYLOUD de Falk Richter au Théâtre du Train Bleu est une petite bombe de théâtre, allumée par un collectif Géranium qui joue fort … qui joue très fort, qui joue plus fort  !

Portraits de jeunesse perdue dans l’immensité anonyme du virtuel et de sa surconsommation de communication. Jeunesse en mal de paroles et de sens, qui crie son manque d’amour et d’émotions vraies. PLAYLOUD est un voyage en texte et en musique à travers des histoires d’enfants, d’adolescents et d’adultes, qui se fracassent contre une société en flagrant délit de reniement de son humanité et de ses émotions.

Un théâtre fort et moderne qui parle à son époque.

3 énormes bonnes raisons d’aller voir PLAYLOUD :

– comme le dit Francis Cabrel (qui aime beaucoup les géraniums), une bonne chanson c’est du son, du sens et du swing … et bien PLAYLOUD c’est ça, mais au théâtre !

– de la jeunesse sur toutes les rangées d’un théâtre, une salle comble et comblée.

– les cœurs battent plus forts en allant voir PLAYLOUD, et même après ça continue

Playloud par le collectif Geranium

jusqu’au 29 Juillet 2018 au Théâtre du Train Bleu à 22h15

Texte de Falk Richter

Mise en scène collective, Interprètes: Cécilia Anseeuw, Adrien Dewitte, Léa Delmart, Fiona Lévy, Damien Sobieraff, Mathilde Weil

Ô toi que j’aime, ou le récit d’une apocalypse

Marie et Ulysse travaillent avec des détenus radicalisés à la création d’un spectacle autour de la figure mystique de Rumi, grand penseur et poète soufi du XIIIe siècle.

Mais ce en sont pas eux que nous entendront en premier. On commence d’abord par un voayge dans le temps, une « chronique historique ». Le 21 février 1258, c’est la capitulation de Bagdad devant Oulagu Khan, qui dévaste la ville. Le récit se déroule avec sa litanie de chiffres effarants, les centaines de milliers de victimes massacrées, violés, les palais, les mosquées, la grande bibliothèque anéantis. Quelques notes lancinantes résonnent, comme un son de oud.

Seulement maintenant on va faire connaissance Marie et Ulysse.
Il n’est pas encore évident qu’ils vont monter ensemble ce projet théâtral en milieu carcéral, pas évident du tout.
Ulysse, c’est le laïc, le pourfendeur des obscurantismes, le défenseur des valeurs occidentales des Lumières, Marie c’est la mystique, avec douceur, la curieuse, celle qui veut passer les ponts – ou en créer, s’il le faut, pour atteindre l’autre, une autre façon d’être idéaliste. Elle le convaincra, ils le monteront ce spectacle, elle le tournera son documentaire.

Ils rencontreront là Nour Assile, jeune syrien au parcours singulier qui ne désire qu’une chose : mourir en martyr. Trop de tension entre son passé, ses principes, sa foi, le poids de son clan et le monde dans lequel in vit, étudiant à Paris-VIII, dont les amis ont la liberté sans façons de la jeunesse occidentale. Trop de tension, et un refuge, la douceur, la compréhension d’un imam salafiste charmeur, qui présente le djihad et le martyr comme des consolations face à l’inéductable de la mort. Au retour d’un voyage de formation militaire à Damas auprès des forces de Daesh, Nour Assile est arrêté. Emprisonné, il souhaitera prendre part à l’atelier de création théâtrale de Marie et Ulysse.

A partir de ce point de jonction, se dérouleront plusieurs fils rouges : les chroniques historiques d’un monde musulman tourmenté; la présentation par Ulysse du spectacle que vont interpréter les hommes de son atelier de théâtre en prison à partir d’un roman d’Elif Shafak « Soufi mon amour » ; le récit de Nour-Assile, de son chemin tortueux vers Dieu – ou vers lui-même…

« Je n’ai pas de certitude à opposer à ceux qui ont les livres et les sermons.
Ils ont des milliers d’années d’Histoire, et moi je n’ai qu’un regard. »

 

Ô toi que j’aime est sous-titré « ou Le Récit d’une apocalypse ». L’apocalypse, c’est la fin du monde, entend-on. Mais l’apocalypse, c’est aussi la révélation. Pour les protagonistes, il est question de fin du monde, d’après qui ne sera plus jamais comme avant, de bouleversements intimes, d’une vie brutalement interrompue (et c’est la fin d’un monde), d’une société qui change; mais il est aussi question de révélation, de ce qui brutalement surgi au jour ou progressivement trouve son chemin, remontant des profondeurs vers la surface.

Le spectacle est touffu, foisonnant, presque proliférant. Sur le plateau de plus en plus nu, aux fils de trame du récit viendront se greffer de longs poèmes en langue arabe, des chants, le prêche d’un imam, les minutes du procès de Nour-Assile, les unes de journaux au lendemain des attentats de novembre 2015, la mer, la musique… pour tracer un motif complexe aux teintes sombres, où c’est, face au poids des dogmes, la rencontre individuelle, un regard humain, la tendresse, qui sauront apporter de la lumière.
Sur le plateau un violoncelliste, un guitariste électrique étoffent l’atmosphère de leur présence. Des chants très beaux s’élèvent parfois, amples, poétiques. Des danses aussi, des esquisses de danse, quelques tournoiements de derviche, les bras levés, la joie débordante. Dans un texte sans cruauté mais sans faux-semblant, dans un univers qui peut s’avérer anxiogène, ces voix, ces quelques pas sont autant de fenêtres ouvertes vers des cieux plus clairs. Tous les interprètes ont un jeu précis, souple et sans fioritures, d’une sensibilité sans pathos. Saluons particulièrement Lahcen Razzougui qui apporte à la partition âpre du jeune radicalisé sa bienveillance, sa profondeur et sa douceur, son émotion juste.
Un spectacle intransigeant et généreux, intelligent, courageux, et gorgé d’espoirs, malgré tout.

Marie-Hélène Guérin

 

ô toi que j'aime, de Fida Mohissen, au 11 Gilgamesh

Ô TOI QUE J’AIME, ou LE RECIT D’UNE APOCALYPSE
Auteur et metteur en scène Fida Mohissen
Avec Stéphane Godefroy, Raymond Hosni, Lahcen Razzougui, Benoit Lahoz, Clea Petrolesi, Amandine du Rivau, David Couturier (guitare électrique Live) et Michel Thouseau (contrebasse Live)
Avignon Off 2018 : au 11 Gilgamesh jusqu’au 27 juillet à 22h

Maloya, langue-monde

 

« Est Réunionnais toute personne qui vit à la Réunion
quelque soit son pays d’origine »

 

Le maloya, c’est la musique traditionnelle de l’île de La Réunion. « C’est simple, le maloya, c’est notre parole. ». C’est simple, et c’est complexe, parce que le maloya vient « des tréfonds de l’Histoire » et, comme l’île, est fait d’Afrique, d’Inde, de passé colonial, c’est une musique mais c’est aussi une expression politique, une transmission affective, une fête, un vestige des rituels vaudous malgaches.

Sergio Grondin à la naissance de son fils, Saël – « Saël, c’est un prénom hébraïque qui veut dire conciliant » -, lui a dit « Bienvenue Saël, mon fils. Ta mère et moi, on est heureux de t’accueillir ». Une nuit a passé, et le coup de poing direct au creux de l’estomac : lui le Réunionnais qui parle créole avec ses parents, ses amis, a prononcé les premiers mots pour son fils en français.

« Comme si la naissance de mon fils
était venue m’annoncer la mort de ma langue maternelle ».

 

Qu’est-ce que raconte ce français ? Qu’est-ce que ça raconte du créole, cette interrogation ?
Avec ses complices de longue date – c’est leur troisème création conjointe -, David Gauchard et Kwalud (co-auteurs et respectivement metteur en scène et créateur des musiques), Sergio Grondin, conteur charismatique, compose un spectacle d’une grande force et d’une intelligence sensible. Du théâtre à vertu documentaire, mais surtout du théâtre à vertu humaniste.

Sergio Grondin est allé à la rencontre de ses compatriotes avec toutes ses questions sur le rapport à la langue, sur le créole, sur l’identité réunionnaise. Smartphone à la main et écouteurs aux oreilles, il va se faire passeur de leurs mots.
En fond de scène, une table de mixage, à ses pieds des blocs de bois clair, des tronçons de canne à sucre, 2 seaux de fer blanc. De ces modestes objets, se construira une scénographie graphique, élégante et rythmique, où la parole du conteur a tout l’espace pour se déployer. Sur le mur de fond seront projetés quelques mots clefs – mouramour, veli -, ou une traduction, lorsque la langue se fait trop inacessible pour le public non créole.
La composition électronique, aux sonorités très contemporaines, jouée en direct par Kwalud, tient le folklore à distance, tout en laissant la place aux chants ou aux poèmes de la mémoire familiale ou ancestrale.

« Parler de l’identité d’un peuple, c’est comme sortir un lambi de la mer : on peut l’observer, c’est un beau coquillage, mais c’est un coquillage mort.
La poésie, le mystère, restent au fond de la mer. »

 

Mais Sergio Grondin, David Gauchard et Kwalud ne font pas que sortir un coquillage de la mer, le retourner entre leurs mains pour le scruter et le porter au regard des autres. Ils ne font pas que fabriquer un outil pour ausculter une parole : « à travers l’écriture de ce spectacle, c’est une cartographie de l’intime et du territoire que j’ai entamée », écrit Grondin. Son intime et son territoire. Pas un coquillage mort : quelque chose où l’on vit, quelque chose que l’on vit. Et dans ce Maloya, la poésie et le mystère ne sont pas restés au fond de la mer : des gouttes d’eau sont remontées avec le coquillage, et leur poésie et leur mystère sont là, bien vivants.

Maloya - Compagnie Karanbolaz - Sergio Grondin - La Réunion - photo ©Ilan Shojnow’s

« Nous vivons dans un bouleversement perpétuel où les civilisations s’entrecroisent, des pans entiers de culture basculent et s’entremêlent, où ceux qui s’effraient du métissage deviennent des extrémistes. C’est ce que j’appelle le « chaos-monde ». (…)
Je crois que seules des pensées incertaines de leur puissance, des pensées du tremblement où jouent la peur, l’irrésolu, la crainte, le doute, l’ambiguïté saisissent mieux les bouleversements en cours. Des pensées métisses, des pensées ouvertes, des pensées créoles. »

Edouard Glissant, entretien accordé au Monde 2, en 2005

Marie-Hélène Guérin

 

MALOYA
Un spectacle écrit par Sergio Grondin, David Gauchard et Kwalud
Mise en scène : David Gauchard
Comédien : Sergio Grondin
Musicien : Kwalud
Avignon Off 2018 : à La Manufacture jusqu’au 26 juillet à 12h
Photo © Ilan Shojnow’s

ILLUSIONS : il était une fois l’amour. Ou pas.

Une fois n’est pas coutume, nous commencerons cette chronique festivalière par un conseil exclusivement réservé aux lecteurs de PIANO PANIER.
Il faut en effet essayer d’être au tout début de la file d’attente d’ILLUSIONS, pour pouvoir être les premiers à pénétrer dans la salle 2 du 11 Gilgamesh et bénéficier d’un privilège particulier. Nous n’en dirons pas plus. Conseil d’ami. Faites-nous confiance. Dès que le noir se fait, quatre comédiens prennent place au cœur du plateau. Deux femmes, deux hommes. Nous ne connaîtrons jamais leurs noms. Ne saurons rien d’eux. Mais nous serons invités, par leur parole, à écouter une histoire. Ou plutôt, des histoires. Tout d’abord celle de Sandra et de Dennis, un couple lié par cinquante-deux ans d’amour sans nuages. Au crépuscule de sa vie, sur son lit de mort, Dennis prend la main de Sandra et, avant de partir, tient à lui livrer la plus belle déclaration d’amour qui soit.

Illusions Ivan Viripaev, mise en scène Olivier Maurin, Cie Ostinato, 11 Gilgamesh © Jeanne Garraud

On imagine la scène. C’est la première femme, incarnée par Clémentine Allain, qui nous la narre dans les moindres détails, au cours d’un long monologue où l’émotion peu à peu grandit et la submerge. Les spectateurs que nous sommes accueillent cette histoire dans un très grand silence, suspendus aux lèvres et aux yeux de la narratrice, qui prend bien soin de nous envelopper collectivement, par un jeu de regards pénétrants, dans sa belle histoire. Quand celle-ci se termine, on « entend » le silence. Toute la salle est manifestement cueillie par ce que nous venons d’entendre.
C’est alors que la deuxième femme prend la parole. Elle est interprétée par Fanny Chiressi, dans un registre moins empathique mais plus direct. Elle va nous raconter, à son tour, l’histoire d’une autre déclaration. Celle d’un autre couple de personnes âgées, Robert et Margaret. Et cette histoire va très vite apporter un éclairage radicalement différent sur celle de Dennis et Sandra.

Illusions Ivan Viripaev, mise en scène Olivier Maurin, Cie Ostinato, 11 Gilgamesh © Julie Allard-Schaefer

Il ne faut bien entendu pas révéler ce que nous apprendrons. Après la deuxième femme, ce sont ensuite les deux hommes, interprétés par Mickaël Pinelli et Arthur Fourcade qui prendront tour à tour la parole et lèveront un nouveau voile sur l’histoire croisée des deux couples Dennis-Sandra et Robert-Margaret.
C’est pourtant, en filigranes, une très belle histoire que l’on écoute avec émotion : il s’agit bel et bien d’ausculter ce qu’est l’amour entre deux personnes, de comprendre son origine, sa raison d’être. Mais au fur et à mesure que la pièce avance, comme autant de focales que l’on appliquerait sur un objectif, notre vision devient de moins en moins précise… alors même que les quatre personnages s’emploient paradoxalement à nous livrer des anecdotes très précises, des détails plus nombreux, et à utiliser des périphrases qui ne laisseraient planer aucun doute sur l’authenticité de leur parole.

 

Illusions Ivan Viripaev, mise en scène Olivier Maurin, Cie Ostinato, 11 Gilgamesh

 «Et maintenant, je veux vous raconter une soirée »

C’est tout le sel de cette pièce écrite par l’auteur russe contemporain Ivan Viripaev : par la grâce d’une écriture absolument virtuose, il met en place progressivement un savant jeu d’illusions, un savoureux système de poupées gigognes, où rien ne s’est vraisemblablement passé comme on nous l’a raconté. Le style est direct et s’emploie à nous convaincre sans aucune hésitation que les quatre personnages devant nous ont été les témoins de première main de ce qu’ils nous racontent. Ou peut-être l’ont-ils complètement inventé : et si la fonction du langage était le personnage principal de cette pièce décidément fascinante ? « Tout est vrai, puisque je vous le raconte » semblent nous dire en permanence les quatre personnages devant nous. Mais rien n’est moins sûr.

Illusions Ivan Viripaev, mise en scène Olivier Maurin, Cie Ostinato, 11 Gilgamesh

Il faut ici rendre grâce à la mise en scène d’Olivier Maurin, qui, par sa direction d’acteurs d’orfèvre, crée une intimité rare entre ses personnages et son public. L’utilisation d’un dispositif bifrontal, (et même un peu plus…), très original, nous place au cœur de cette narration collective.
Clémentine Allain, Fanny Chiressi, Mickaël Pinelli et Arthur Fourcade sont réellement formidables. A la fois habités par les histoires qu’ils racontent, et stimulés par le jeu qu’ils nous jouent, ils passent sans cesse de chaque côté du miroir avec une jubilation communicative. Leur jeu sans texte, leurs regards croisés, ou portés vers nous, sont particulièrement précis et efficaces.
« La fleur de l’illusion produit le fruit de la réalité », disait Paul Claudel. Nous sortons d’ILLUSIONS avec beaucoup de doutes sur la véracité des histoires qu’on nous a contées, mais avec une certitude, bien réelle : celle d’avoir assisté à une démonstration de théâtre de haute volée.

Stéphane Aznar

Illusions Ivan Viripaev, mise en scène Olivier Maurin, Cie Ostinato, 11 Gilgamesh

ILLUSIONS
Un spectacle texte d’Ivan Viripaev
Mise en scène : Olivier Maurin
Avec Clémentine Allain, Fanny Chiressi, Arthur Fourcade, Mickaël Pinelli
Avignon Off 2018 : au 11 Gilgamesh du 6 au 27 juillet à 17h05

 

Le Voyage de Miriam Frisch

De longues tablées de bois clair attendent les spectateurs, à leurs bouts deux estrades, sur les côtés deux écrans. On prend place, un petit verre à la main, coude à coude avec son compagnon peut-être, ou un inconnu. Quatre jeunes gens entament des silencieux rituels, lavage des mains, allumage des bougies… Des bouteilles d’eau, de vin, passent de main en main… Autour de ces tables de banquet va pouvoir se déployer l’histoire du spectacle.
Linda Blanchet a composé ce récit à partir l’ histoire de Miriam Coretta Frisch, jeune Allemande qui a décidé de partir en kibboutz pendant 7 semaines, l’année de ses 25 ans, en 2012. Du témoignage de cette expérience, enrichi par un travail collectif de la troupe sur les questions d’identité, de transmisson, elle a fait naître une forme hybride – théâtre documentaire autant que monologue polyphonique -, où se côtoient fragments de réalité et fantaisie, faux reportage et vraies confidences, entretien à la webcam et séances diapos, touchants moments de chants et cuisine paternelle…
Et si le « kibboutz » signifie la « collectivité », Miriam dans sa quête de sens et de communauté sera collégiale : ils seront quatre à offrir leur voix, leur corps, leurs souvenirs, à Miriam, la jeune femme en quête d’identité : elle sera brune, blonde, garçon ou fille, elle changera de taille, de couleur de peau, d’accent !

Qu’est-ce qui fait courir Miriam Frisch ?

« Je voulais voir ce qui se cache derrière l’idée du collectif, comment les gens s’organisent ensemble »… mais aussi « je me demandais qu’est-ce qui était possible en dehors du capitalisme »… mais surtout « j’avais une sorte de culpabilité abstraite » : un besoin – pour celle qui est de la génération d’après la génération d’après – de prouver qu’être un Allemand ce n’est pas forcément être « un monstre », de passer outre le passé, sans l’oublier. Miriam, jeune femme allemande, non juive, pérégrinant en ce début de XXIe siècle de kibboutz en kibboutz, porte ces questions de son temps. Les rêves personnels, les envie d’utopie se frottent au lourd poids de l’Histoire, et de l’histoire familiale.

4 bonnes raisons de prendre part au voyage de Miriam Frisch :

1 – Les comédiens, tour à tour dans la narration ou l’action, ont tous les quatre de la pertinence, de la bienveillance et de la sincérité. Quatuor harmonieux et vivace, ils sont aussi justes dans la légèreté fantasque que dans la gravité.
2 – Il est bon parfois de laisser de côté les réponses pour offrir de l’espace et du temps aux interrogations. Ici, on leur accorde la place d’honneur – aux « pourquoi », aux « comment », aux « que faire avec hier », aux « pourquoi faudrait-il forcément faire avec hier », « comment faire pour demain »… chacun fera son propre voyage en compagnie de Miriam Frisch pour débusquer celles qui résonnent en lui, celles qui creuseront un sillon qui fera une place à une réponse, peut-être, un jour.
3 – L’intelligence du dispositif, qui s’affranchit des frontières entre réalité et fiction à chaque rouage : dans l’écriture, dans la mise en scène, dans le registre de jeu, dans le rapport « scène-public ».
4 – Un de ces cadeaux que fait parfois le théâtre au spectateur : l’occasion d’un partage.

Marie-Hélène Guérin

 

Le Voyage de Miriam Frisch, Compagnie Hanna R Photo © Gaëlle Simon

LE VOYAGE DE MIRIAM FRISCH
Un spectacle écrit et mis en scène par Linda Blanchet
Avec Calypso Baquey, Angélique Zaini, William Edimo, Cyril Texier ou Maxime Coggio
Avignon Off 2018 : à La Manufacture du 6 au 26 juillet à 17h55